Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Polo (Marco) (suite)

La Description du monde est beaucoup plus qu’un simple récit de voyage, C’est un tableau géographique, ethnique et économique de la Chine, un répertoire de ses croyances, de ses rites et de ses institutions, une anthologie des fables concernant son passé légendaire (notamment sur Gengis* khān et le « Prêtre Jean »), une chronique enfin de quinze ans de son activité politique. Le témoignage de Marco Polo est certes souvent lacunaire ou erroné, et le Vénitien ne résiste pas toujours à la tentation d’embellir son récit ou d’exagérer son rôle dans les événements auxquels il a pris part ; on ne peut toutefois manquer d’être frappé par l’esprit critique avec lequel il cite les sources qu’il consulte sur les événements, les mœurs et les contrées qu’il n’a pu connaître directement. S’il n’a que des rudiments de chinois, il a une connaissance approfondie du mongol et surtout du persan, langue pratiquée dans toute la Chine centrale et orientale pour les échanges culturels et commerciaux. Enfin, l’ampleur de ses informations tient, autant qu’à l’exceptionnelle durée de son séjour, aux fréquentes missions qu’il eut l’occasion d’effectuer à l’intérieur de la Chine pour le compte de Kūbīlāy, en qualité notamment d’administrateur des gabelles. Outre deux ambassades au Champa et à Ceylan, contrées qu’il retrouvera sur la route de son retour en Europe par les mers du Sud, il accomplit en particulier deux grands voyages, l’un de Pékin au Yunnan (Yun-nan) et l’autre de Pékin au Fujian (Fou-kien).

Rédigé par Rustichello dans un français mêlé de vénitien, le manuscrit original du Milione est perdu, mais le succès du récit fut tel qu’il fut aussitôt transcrit dans la plupart des langues romanes et en latin. On en connaît 143 manuscrits dont les plus remarquables sont le manuscrit franco-italien no 1116 de la Bibliothèque nationale de Paris (début xive s.), le Livre des merveilles du monde du duc Jean de Berry (B. N., Paris, 1400), la version latine de F. Pipino (Florence, 1320) et la version italienne de G. B. Ramusio (Navigationi e viaggi, 1559). La découverte à Milan d’un manuscrit de 1795, copie d’un exemplaire latin de 1470 retrouvé ensuite à Tolède, a donné lieu à trois remarquables éditions modernes, établies, en italien par L. F. Benedetto (Florence, 1928, et Turin, 1962), en anglais par A. C. Moule et P. Pelliot (Londres, 1938) et en français par L. Hambis (Paris, 1955).

J.-M. G.

 L. F. Benedetto, Uomini e tempi. Pagine varie di critica e storia (Milan et Naples, 1953). / G. Del Guerra, Rustichello da Pisa (Pise, 1955). / L. Olschki, L’Asia di Marco Polo. Introduzione alla lettura e allo studio del « Milione » (Florence, 1955). / Nel VII Centenario della nascita di M. Polo (Venise, 1955). / La Civiltà veneziana del secolo di M. Polo (Florence, 1955).

Pologne

En pol. Polska, État d’Europe centrale ; 312 677 km2.


Le cadre naturel et les régions

La Pologne est une vaste plaine (plus de 90 p. 100 du territoire se trouvent à moins de 300 m d’altitude), terminaison de la grande plaine glaciaire (dite « germano-polonaise »), mais bordée de montagnes au sud.


La Pologne des montagnes

Elle se compose de deux ensembles qui forment la frontière linguistique et religieuse avec la Tchécoslovaquie. À l’ouest de l’Odra, le rebord oriental et nord-oriental des montagnes hercyniennes des Sudètes et des monts des Géants (Karkonosze) présente quelques petits massifs cristallins, des sommets à empreinte glaciaire ou nivale (vers 1 600 m d’altitude), des horsts et des fossés primaires constituant des bassins élargis comme ceux de Jelenia Góra et de Wałbrzych ; les vallées, formant des défilés ou des cuvettes, sont toutes affluentes montagnardes de l’Odra (Nysa Kłodzka, Bystryca, Bobra et Kwisa ; enfin, constituant la frontière avec la R. D. A., la Nysa Łużycka).

Ces montagnes ont été peuplées par des pasteurs-agriculteurs qui pratiquaient la transhumance avec les vallées et l’avant-pays et par des mineurs attirés par les gisements des filons éruptifs (plomb, zinc, or). La forêt est découpée, les hauts sommets arrondis et dénudés sont semés de chalets domestiques. La fixation dans les vallées de la population des hauteurs, l’industrialisation des villes de bassins et de vallées, la modernisation des vieilles industries du verre, du bois et des textiles constituent les grandes orientations actuelles de développement. Jelenia Góra, Kłodzko, avec quelques dizaines de milliers d’habitants chacune sont les centres industriels les plus importants. Près de Wałbrzych (120 000 hab.), plusieurs millions de tonnes de charbon brun sont extraites ; Kłodzko est demeuré un centre de commerce en rapport avec les pays tchèques. L’élevage moderne et les cultures fourragères ont transformé la vieille agriculture pastorale. Un tourisme populaire de masse s’est développé, utilisant les chalets pastoraux des hauts sommets désormais délaissés, avec même des résidences secondaires. De nouvelles ressources polymétalliques et surtout de lignite à Turoszów à la frontière de la R. D. A. (avec échange de main-d’œuvre) ont contribué à transformer cette région.

Enfin, les pays qui descendent par gradins, collines, terrasses étagées, plus ou moins couverts de lœss, en direction de l’Odra moyenne sont de riches campagnes alluviales ou lœssiques où se concentre, commandé par la ville d’Opole, l’essentiel d’une vie rurale dominée par l’élevage.

La Pologne carpatique est plus large et un peu moins longue, coupée par la nouvelle frontière soviéto-polonaise. Elle se compose des hautes pyramides cristallines creusées de lacs qui caractérisent les Tatry et la frontière avec la Slovaquie (le pic de Gerlachovka, en Slovaquie, avec plus de 2 600 m, est le point culminant) ; c’est un pays malaisément traversé (cols trop élevés). La plupart des montagnes moyennes en contrebas forment les Beskides occidentales et orientales, constituées de chaînons de flysch surtout gréseux qui descendent, par paliers et de bassins montagnards, en direction de la Vistule. La plus haute partie a été colonisée par des pasteurs polonais et valaques qui pratiquaient il y a peu de temps encore une vie de remues pastorales primitives avec transhumance et nomadisme ; de nos jours, la plus grande station de sports d’hiver des pays socialistes, Zakopane, attire des centaines de milliers d’étrangers et de Polonais et a contribué, pour des raisons de ravitaillement, à la stabulation des troupeaux. Le bassin de la rivière Dunajec a un relief glaciaire, traverse des lacs mi-naturels, mi-artificiels et se termine près de Tarnów. Les autres affluents de la Vistule tranchent les grandes directions longitudinales du flysch, ce qui détermine la formation de défilés, de bassins plus ou moins élargis où se concentre, autour de bourgs de quelques milliers d’habitants, une industrie du bois et du textile.