Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

armement maritime (suite)

L’armateur est généralement affilié à des groupements professionnels, qui sont particulièrement puissants en Grande-Bretagne. En France existe un Comité central des armateurs, créé en 1903. Le rôle principal de ces associations est de défendre les intérêts généraux de la profession, notamment vis-à-vis des pouvoirs publics, et souvent de négocier avec les syndicats du personnel navigant pour ce qui concerne les rémunérations et les conditions générales de travail. Ces groupements participent à divers organismes internationaux. Il s’agit, par exemple, de ceux qui s’efforcent de faire progresser l’unification du droit maritime ou qui, pour l’Europe des Six, étudient les conséquences, dans le domaine maritime, du traité de Rome.


Dualité et rivalité des Temps modernes


Le rôle des compagnies coloniales

Dans le cadre de cette politique se situe la création, dès le début du xviie s., en Angleterre, puis aux Pays-Bas et en France, des compagnies coloniales fondées par apport de capitaux privés, mais bénéficiant de monopoles et d’appuis officiels. Elles se présentent surtout comme des sociétés de colonisation pour lesquelles le navire n’est qu’un instrument au service de leurs très diverses activités. Il s’en faut de beaucoup que celles-ci soient toutes heureuses.


La survie de l’armement marchand

Face à ces compagnies disposant de l’appui officiel, dotées d’un important matériel, d’un personnel nombreux et d’établissements bien équipés en Europe et outre-mer, existent des armements de moindre importance, dirigés par un ou plusieurs négociants associés, qui exploitent des navires de petit et moyen tonnage. À ce moment s’amorce l’autonomie du transport maritime en tant que tel, certains propriétaires mettant leurs navires à la disposition de leurs clients sans avoir des intérêts directs dans les opérations commerciales et se bornant à recevoir la rémunération du transport. La formule devait se généraliser. Les armateurs privés, se heurtant aux privilèges des grandes compagnies, ne cessent de protester contre ceux-ci jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Mais, entre la mort de Colbert et le règne de Louis XVI, d’autres causes contribuent à leur faire connaître des jours difficiles. Bien qu’une ordonnance de 1629 décide que les gentilshommes ne dérogeraient pas en s’adonnant au trafic maritime et, même, que les roturiers jouiraient des privilèges de la noblesse après avoir entretenu un vaisseau pendant cinq années consécutives, cette activité est abandonnée par ceux-là même qu’elle avait enrichis et qui préfèrent acheter des titres de rentes ou des charges. D’autre part, la distinction entre navire de guerre et bâtiment du commerce n’est pas aussi tranchée qu’elle devait le devenir au xixe s. Pendant longtemps, l’État ne conserve, en temps de paix, qu’un nombre restreint d’unités, que renforcent en temps de guerre les navires marchands. Souvent ceux-ci sont armés pour résister à la piraterie, fréquente dans certaines mers.

De plus, quelques armateurs se consacrent à la course, c’est-à-dire que, munis de lettres de marque, leurs capitaines peuvent se livrer régulièrement à des actes de guerre dont les risques trouvent leur contrepartie dans l’éventualité de bonnes prises. Enfin, la prospérité de plusieurs armements est assurée par la traite des Noirs, notamment au Portugal, en Espagne et en Angleterre. En France, Nantes et Bordeaux en tirent un très grand profit.

Le règne de Louis XVI est marqué par une notable renaissance maritime, précédemment amorcée par Choiseul, mais la Révolution et l’Empire la compromettent en raison du malaise économique et de l’insécurité financière qui paralysent les affaires. La Terreur éclaircit les rangs des armateurs, notamment à Marseille. La perte de Saint-Domingue (1808) provoque la faillite de plusieurs maisons d’armement. Enfin, la maîtrise absolue des mers acquise par les Anglais après la défaite de Trafalgar, puis le Blocus continental accentuent le déclin de notre pavillon.


L’armement capitaliste


Les origines

La période de paix due à la Restauration et le retour à diverses mesures de protection permettent un redressement de la situation, mais il est très lent, car les entreprises d’armement, généralement groupées dans le cadre étroit d’un seul port, ne peuvent facilement faire appel au marché national des capitaux. Or, sous l’effet des progrès techniques, le coût des navires s’accroît, tandis que la création de lignes régulières, indispensables pour répondre aux besoins d’un commerce international en pleine expansion, impose à l’armateur la mise en œuvre d’un nombre d’unités suffisant pour assurer une bonne périodicité de ses services. Seules des sociétés importantes, réunissant les capitaux nécessaires à la constitution d’une flotte nombreuse, peuvent y parvenir.


Les sociétés

Après une brève et décevante expérience de flotte d’État desservant la Corse, l’Algérie, le Levant (1835) et même la Louisiane (1840), on assiste, en France, à la naissance de grands armements capitalistes, tels que la Compagnie des services maritimes des messageries impériales en 1851 (devenue Compagnie des messageries maritimes), et de divers armements marseillais. En 1855, les frères Pereire, Émile (1800-1875) et Isaac (1806-1880), fondent la Compagnie générale maritime, qui, en 1861, devient la Compagnie générale transatlantique. Par groupement de plusieurs négociants havrais et parisiens se crée, un peu plus tard, la Compagnie des chargeurs réunis. Presque toutes les grandes compagnies françaises de navigation sont d’ailleurs fondées sous le second Empire ou au lendemain de la guerre franco-allemande de 1870. À l’étranger, la même évolution se manifeste vers la substitution de grandes sociétés par actions au petit armement privé. En Angleterre, la Cunard inaugure dès 1840 son premier service régulier sur les États-Unis, tandis que se créent au même moment la Peninsular and Oriental Steam Navigation Company (P & O) ainsi que la Royal Mail Steam Packet Company. En 1870, la White Star commence une carrière brillante, mais qui se terminera, en 1934, par une fusion avec la Cunard Line, sa concurrente. En 1847 se crée en Allemagne la Hamburg-Amerikanische-Packetfahrt, suivie, dix ans plus tard, par le Norddeutscher Lloyd, fondé à Brême par fusion de plusieurs petites entreprises. L’Italie possède bientôt deux importants armements à Gênes : Navigazione générale Italiana (1881) et Lloyd Sabaudo (1906), qui sont à l’origine de l’actuelle Italia. L’Espagne a la Trasatlántica à Barcelone.