Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Poissons (suite)

L’appareil digestif

Le tube digestif est peu différencié chez les Poissons. Au pharynx, dont les fonctions sont également respiratoires, font suite l’œsophage, puis l’estomac — qui peut manquer chez certains Téléostéens — et l’intestin. Ce dernier est court chez les Sélaciens, mais une valvule spirale interne — qu’on retrouve chez les Esturgeons et les plus primitifs des Téléostéens — retarde le cheminement du bol alimentaire et favorise l’absorption ; cette dernière a lieu au niveau de cæcums pyloriques chez de nombreux Téléostéens. Chez les Sélaciens, l’intestin aboutit au cloaque, où débouchent les voies génitales et excrétrices. Chez les Téléostéens existent trois orifices impairs successifs : l’anus, l’orifice génital puis l’orifice urinaire, c’est-à-dire la disposition inverse de celle des Mammifères.

Les Poissons ont un régime alimentaire très varié, mais la plupart sont des prédateurs, et leur denture, dans ce cas, comporte un grand nombre de dents pointues toutes semblables, qui permettent la rétention des proies, avalées entières. Les espèces herbivores peuvent avoir des dents émoussées ou, comme les Dorades, des dents coupantes en avant et des molaires en arrière ; les conchyliophages, qui se nourrissent de Mollusques, ont des dents en meule leur permettant de briser les coquilles ; les microphages, qui se nourrissent de plancton ou de particules en suspension dans l’eau, ont un appareil filtrant situé en avant des branchies ; c’est un réseau enchevêtré d’épines, les branchicténies, portées par les arcs branchiaux. C’est parmi les microphages qu’on rencontre les géants des mers actuelles. Outre les Cétacés Mysticètes, en effet, les plus gros animaux aquatiques sont le Requin-Pèlerin, et le Requin-Baleine, qui peuvent dépasser une quinzaine de mètres et ne s’attaquent jamais à l’Homme.


L’appareil respiratoire

Tous les Poissons respirent par des branchies disposées le long de fentes faisant communiquer le pharynx avec l’extérieur. Ces fentes latérales, cinq sur chaque flanc, sont visibles chez les Sélaciens en arrière d’un orifice dorsal plus petit, le spiracle. Chez ces animaux, les branchies sont disposées en lames le long des septes, dont les arcs branchiaux forment le squelette. Chez les Holocéphales, un repli cutané, ou faux opercule, vient recouvrir ces fentes et ne laisse subsister qu’une fente postérieure. Il en va de même chez les Poissons osseux, chez lesquels, toutefois, ce repli operculaire est soutenu par des os dermiques articulés sur l’hyomandibulaire (opercule stricto sensu). C’est au niveau des branchies que le sang se charge d’oxygène et abandonne son gaz carbonique.

Les poumons des anciens Ostéichthyens ont subsisté chez les Dipneustes et les Polyptères sous forme de deux sacs — un seul chez Neoceratodus — reliés par une courte trachée au pharynx postérieur. Ces poumons restent ventraux au tube digestif chez les Polyptères, tandis qu’ils acquièrent une position secondaire dorsale chez les Dipneustes. Histologiquement, les poumons des Dipneustes se rapprochent par leur complexité de ceux des Amphibiens — des septes issus des parois découpent le volume interne —, tandis que ceux des Polyptères, plus primitifs, ne sont guère plus que des sacs aux parois richement irriguées. Dans tous les cas, l’irrigation se fait à partir de la sixième paire embryonnaire d’arcs aortiques, dite « pulmonaire », et le sang est ramené au cœur par des veines spéciales, réalisant ainsi une circulation pulmonaire autonome.

Il existe d’autres organes respiratoires annexes en dehors des branchies et des poumons. Des Holostéens, comme le Lépisostée, peuvent utiliser leur vessie gazeuse. Dans les autres cas, ces organes dérivent des branchies ou de la cavité pharyngienne et permettent aux Poissons qui les possèdent de respirer l’air en nature, si bien que ceux-ci peuvent ainsi ou survivre dans des eaux dépourvues d’oxygène ou s’aventurer à terre pendant des périodes plus ou moins longues (Anabas du Sud-Est asiatique) et divers Siluridés tels que Sacchobranchus, chez qui des diverticules branchiaux s’étendent jusqu’à la queue.


La vessie natatoire

Seuls les Actinoptérygiens possèdent une vessie natatoire, qui est un diverticule dorsal de l’œsophage qu’irrigue une artère vésicale issue de l’aorte. Chez les espèces physostomes, la connexion avec le tube, ou canal pneumatique, subsiste, et l’animal peut vider sa vessie par ce canal. Chez les espèces physoclistes (Téléostéens évolués), la connexion disparaît chez l’adulte, et les échanges gazeux se font par l’intermédiaire de glandes secrétaires richement vascularisées : la glande à gaz, antéroventrale, libère les gaz dans la vessie, tandis que l’ovale dorsal assure l’excrétion des gaz dans le sang. On trouve de l’oxygène, du gaz carbonique et de l’azote dans la vessie natatoire, mais dans des proportions différentes de celles de l’air atmosphérique.

La vessie natatoire est un organe hydrostatique permettant aux Poissons de « flotter sans poids » dans l’eau et d’ajuster le niveau où se réalise cette flottaison. C’est là un progrès considérable, en ce qui concerne la locomotion, sur les Chondrichthyens, plus lourds que l’eau, chez lesquels les nageoires caudale (dite « hétérocerque ») et pectorale doivent avoir une orientation oblique pour contrebalancer à tout moment l’effet de la pesanteur. Chez les Téléostéens, la caudale devient homocerque (c’est-à-dire symétrique par rapport au plan horizontal), et les pectorales, insérées verticalement, peuvent servir d’organes de freinage dans la locomotion.

La plupart des espèces abyssales sont dépourvues de vessie gazeuse ; chez elles, l’hydrostatique est obtenue par l’allégement considérable du squelette, dû lui-même à la pauvreté en sels calcaires des eaux des grands fonds.


L’appareil circulatoire

Si l’on excepte le cas des Dipneustes et des Polyptères, la circulation du sang chez les Poissons comporte une seule boucle, qu’interrompent les capillaires branchiaux en avant du cœur ; c’est l’aorte qui distribue le sang oxygéné dans tout le corps. Des capillaires généraux, le sang est repris dans les veines qui retournent au cœur, lequel ne contient donc que du sang réduit. Sur ce trajet se situent deux systèmes portes : l’un au niveau du foie, entre la veine intestinale et la veine sus-hépatique ; l’autre au niveau de chacun des deux reins, sur le trajet des veines cardinales postérieures. Le cœur lui-même est formé de quatre cavités successives : le sinus veineux, l’atrium (qui se subdivise en deux oreillettes chez les autres Vertébrés), le ventricule et le bulbe aortique. Le sang contient des globules rouges nucléés à hémoglobine et des globules blancs. Quelques Téléostéens des mers froides antarctiques ont un sang incolore et semblent dépourvus de pigments respiratoires (Chœnichthys).