Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Plutarque (suite)

Plutarque ne cessa jamais d’écrire sur des sujets touchant aussi bien à la philosophie, à la morale qu’à la littérature, à l’histoire ou aux sciences. Un bon nombre de ses livres sont aujourd’hui perdus. On divise traditionnellement ceux qui subsistent en deux groupes : les Œuvres morales et les Vies parallèles. Les premiers sont de simples recueils de faits et d’anecdotes, des conférences littéraires ou philosophiques, des consultations épistolaires, des dialogues, l’ensemble traitant des sujets les plus divers et demeurant séduisant par la variété des choses concrètes, l’ingéniosité des rapprochements et des réflexions, la vivacité du discours. Plutarque y fait preuve d’une modération indulgente et d’un grand bon sens : il défend des idées raisonnables, moyennes. Sans doute, sa philosophie paraît un peu terre à terre : du moins s’adresse-t-elle à d’honnêtes gens autant qu’à ceux qui tâchent de devenir tels. Dans les Vies parallèles, où s’opposent nom à nom, outre quatre biographies isolées, quarante-six Grecs et Romains, Plutarque veut prouver que la Grèce est loin d’être inférieure à Rome. C’est avant tout à cette œuvre que l’auteur doit sa renommée.


Un historien moraliste

« L’histoire est pour moi comme un miroir, devant lequel je m’essaye à embellir ma vie en la conformant aux grands exemples. » L’intention profonde des Vies parallèles est évidente : elles doivent avoir une valeur éducative, être une école des mœurs. Mais comment procède Plutarque ? « Ce que je me suis surtout efforcé de réunir, ce sont les traits qu’on ignore communément, soit qu’ils aient été rapportés çà et là par d’autres historiens, soit qu’on les trouve attestés par des monuments et des décrets anciens ; dédaignant d’amasser ce qui ne dit rien, j’ai recueilli ce qui est propre à faire connaître les mœurs et la nature de l’âme. » Telles sont sa méthode et son ambition : après un sérieux travail de consultation des sources — à vrai dire sans grand esprit critique —, Plutarque vise à la biographie psychologique, où les petits faits vrais, les « signes de l’âme », ont plus d’importance que les grands desseins et que les événements, pour autant qu’ils révèlent une personnalité. De là, anecdotes, bons mots, attitudes et habitudes familières trouvent naturellement leur place dans un récit qui cherche à être une description morale. Plus que le héros, Plutarque veut peindre l’homme. Il reste que ses Vies ont dégagé, par les exemples qu’elles proposent, un certain genre de grandeur propre à l’Antiquité. À les lire, on garde présente à l’esprit l’idée d’un type particulier, probablement plus idéal que réel, mais qui, dans sa simplification même, séduit par son élévation.

La popularité de Plutarque a égalé celle des écrivains les plus célèbres. Les Vies ont été le bréviaire de plusieurs générations. C’est dans ces biographies que la Renaissance reconnut l’idéal antique (aux xvie et xviie s., la traduction d’Amyot ne fut-elle pas l’ouvrage le plus répandu en France ?) et que s’alimenta jusqu’à la Révolution le culte de la « vertu ». Peut-être cette renommée est-elle due au fait que Plutarque a résume dans son œuvre l’image de l’Antiquité hellénique au moment où celle-ci touchait à sa fin. Il apparaît également que les leçons morales qu’il proposait avaient quelque chose de rassurant, à une époque de remise en question de certitudes théologiques, aux yeux des lecteurs qui s’interrogeaient sur l’avenir et la valeur de l’homme et qui étaient inconsciemment heureux de voir vivre devant eux des modèles tout faits, d’accès facile et, à la limite, presque conventionnels. La gloire de Plutarque est aujourd’hui atténuée : on est surtout sensible à sa sympathie pour tout ce qui est humain et à son talent de conteur.

A. M.-B.

 R. Hirzel, Plutarch (Leipzig, 1912). / B. Latzarus, les Idées religieuses de Plutarque (Leroux, 1921). / N. J. Barbu, les Procédés de la peinture des caractères et la vérité historique dans les biographies de Plutarque (Nizet et Bastard, 1934). / G. Soury, la Démonologie de Plutarque (Les Belles Lettres, 1942). / S. Mallinger, les Secrets ésotériques dans Plutarque (Niclaus, 1946). / K. Ziegler, Plutarchos von Chaironeia (Stuttgart, 1949). / M. A. Levi, Plutarco e il V secolo (Milan, 1955). / H. Mounard, la Psychologie de Plutarque (thèse, Paris, 1960). / R. Flacelière, Sagesse de Plutarque (P. U. F., 1964). / R. Aulotte, Amyot et Plutarque. La tradition des « Moralia » au xvie siècle (Droz, Genève, 1965) ; Plutarque en France au xvie siècle (Klincksieck, 1971). / F. Fuhrmann, les Images de Plutarque (Klincksieck, 1966). / D. Babut, Plutarque et le stoïcisme (P. U. F., 1970).

plutonium

Élément artificiel, de numéro atomique 94, faisant partie de la famille des transuraniens (symb. Pu).


Le plutonium a été isolé au laboratoire de Berkeley (États-Unis) par Seaborg et son équipe, qui découvrirent son isotope 238, obtenu en bombardant de l’uranium par des deutons, en août 1942. C’est à Hanford (Washington) que les Américains construisirent leur première usine de plutonium.

Glenn Théodore Seaborg

Chimiste américain (Ishpeming, Michigan, 1912). En collaboration avec Edwin Mattison McMillan, il découvrit en 1941 le plutonium, dont il étudia les propriétés. Puis il obtint l’américium et le curium (1945), le berkélium et le californium (1950). Prix Nobel de chimie (avec McMillan) en 1951.


Propriétés et isotopes

Le plutonium est un métal gris clair qui présente six variétés allotropiques et dont la masse volumique est comprise entre 15,9 et 19,8 g/cm3.

On connaît une quinzaine d’isotopes du plutonium, dont les nombres de masse sont compris entre 232 et 246.

Tous ces isotopes sont artificiels, et pourtant G. T. Seaborg et son équipe ont réussi à mettre en évidence, au début de 1971, l’existence du Pu244 naturel (période de 82,8 millions d’années) en traitant 8,5 kg de bastnaésite pure obtenue à partir d’un minerai de fluocarbonate de terres rares.

L’isotope le plus important est le Pu239, dont la période est de 24 000 ans ; il est émetteur d’un rayonnement alpha (énergie, 5 MeV ; portée dans l’air, 3,5 cm). Le Pu239 et le Pu241 (T = 14 ans) sont des matières fissiles ; le Pu240 (6 580 ans) est fertile : il permet de produire le Pu241.

Le plutonium — dont la valence est 4 ou 6 — fond à 1 593 °C ; il s’oxyde dans l’air humide en donnant PuO et PuO2. Il est attaqué par les acides sulfurique et chlorhydrique, mais non par l’acide nitrique.