Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pipe-line

Longue conduite, généralement enterrée, servant au transport à distance des fluides. (On dit aussi pipe, oléoduc dans le cas du transport de produits pétroliers liquides et gazoduc s’il s’agit de gaz combustible.)


Le transport de l’eau par des canalisations en terre cuite était connu des civilisations anciennes, tandis que les Chinois construisaient déjà des réseaux de bambou pour distribuer le gaz naturel domestique. Les débuts de l’industrie du pétrole en Pennsylvanie vers 1865 firent naître le premier pipe-line long d’une dizaine de kilomètres : son diamètre n’était que de deux pouces (5 cm). À la fin du xixe s., les Russes relièrent les champs de Bakou, sur la mer Caspienne, à la mer Noire distante de 800 km par une ligne de 15 cm. Actuellement, les progrès techniques accomplis dans la métallurgie des tubes d’acier permettent la construction de pipe-lines dont le diamètre dépasse un mètre, sur des distances de milliers de kilomètres, à travers les plus hautes chaînes de montagnes comme au fond des mers.


Divers types de pipe-lines

• Pipes à brut. Le réseau de collecte reliant les puits d’un même gisement au centre de traitement et d’expédition du pétrole brut se prolonge ensuite par un oléoduc principal aboutissant soit à la raffinerie, soit au terminal côtier où viennent charger les tankers. D’autres pipes à brut partent du port d’arrivée de ces derniers pour acheminer l’huile jusqu’aux raffineries situées à l’intérieur des régions consommatrices.

• Pipes à produits finis. Ce genre d’ouvrage peut être soit une simple ligne reliant une raffinerie à un client particulier, par exemple une usine de pétrochimie, pour lui fournir un produit déterminé, soit un système complexe multiproduits alimenté par un groupe de raffineries voisines, dans une région maritime, et ravitaillant par un pipe-line commun tout un ensemble de dépôts de stockage et de distribution situés dans une zone consommatrice distante de centaines de kilomètres. Dans ce cas, les « batches », ou lots successifs, sont expédiés suivant un cycle : légers - lourds - légers (super - essence - carburéacteur - gasoil - fuel domestique - fuel léger - fuel domestique - gasoil - carburéacteur - essence - super - etc.), afin de réduire les effets de la légère contamination inévitable d’un produit sur le suivant.

• Pipes à fuel lourd. Il n’est pas possible de faire passer du fuel-oil lourd dans un oléoduc multiproduits ordinaire, non seulement parce qu’il noircirait irrémédiablement les carburants, mais parce que sa viscosité élevée nécessite un transport à chaud, donc une ligne spécialement réchauffée et calorifugée. La mise au point de revêtements isolants en mousse de polyuréthanne a permis de surmonter plus facilement cette difficulté.

• Gazoducs. Le transport du gaz naturel par pipe-line est une des plus grandes entreprises actuelles et figure parmi les plus importants moyens connus pour fournir l’énergie nécessaire au monde moderne. Néanmoins, un oléoduc d’un diamètre donné peut transporter économiquement environ quatre fois plus de calories sous forme de pétrole brut qu’un gazoduc ne le fera sous forme de méthane, dont la masse volumique, même à l’état comprimé, reste beaucoup plus faible.

• Pipes à gaz liquéfiés. Propanoducs, butanoducs ou éthylénoducs véhiculent des hydrocarbures normalement gazeux, mais amenés à l’état liquide ou pseudo-critique par compression ou par réfrigération.

• Sea-lines. Ce sont des oléoducs ou des gazoducs sous-marins, placés dans une souille ensuite remblayée pour éviter l’accrochage par un chalut ou une ancre ; ils relient les gisements off shore à la côte la plus proche, raccordent à la rive les postes d’amarrage sur rade et servent à la traversée de bras de mer.


Construction d’un pipe-line


Conception

Pour une capacité donnée, l’ingénierie aura à choisir entre une ligne de grand diamètre, à faible perte de charge et avec peu de stations de pompage, et une ligne plus petite comportant des stations plus rapprochées. Dans le premier cas, l’investissement sera plus élevé et les frais d’exploitation moindres, dans le second cas, ce sera l’inverse. Le coût de fonctionnement d’un pipe-line est constitué, pour une très grande part, de frais d’entretien et d’énergie pour l’exploitation des stations de pompage de l’huile ou de compression du gaz échelonnées le long de l’ouvrage, et le diamètre retenu doit permettre une augmentation de capacité ultérieure grâce à l’adjonction de stations intermédiaires nouvelles.

Le tracé sur le terrain commence par une étude domaniale ayant pour objet d’identifier les propriétaires des parcelles à traverser, puis de négocier avec eux et avec leurs fermiers un droit de passage, compensation financière pour la servitude double qui leur sera imposée, pour la construction du pipe d’abord, pour la surveillance et les réparations ensuite. En France, ces négociations, qui peuvent concerner plusieurs milliers de parcelles dans le cas d’un long oléoduc comme celui de la Méditerranée à Strasbourg, sont facilitées par une législation spéciale, dite « des pipe-lines d’intérêt général », qui permet aux autorités de promulguer le décret d’utilité publique et, le cas échéant, de prononcer l’expropriation. À l’inverse, les ouvrages construits dans les régions désertiques, comme le Sahara ou la Sibérie, présentent peu de difficultés domaniales, mais l’absence de ressources en électricité augmente considérablement le coût des stations intermédiaires.

La réalisation des grands pipe-lines modernes est due, pour une bonne part, aux progrès métallurgiques dans la fabrication du tube : ce dernier est obtenu par soudure à l’arc submergé de tôle soigneusement laminée et cintrée, à l’aide de machines de soudage automatiques.

Les métallurgistes ont mis au point des aciers à haute limite élastique dénommés :
X 52 ; limite élastique = 36,4 kg/mm2 ;
X 60 ; limite élastique = 42 kg/mm2 ;
X 65 ; limite élastique = 45,5 kg/mm2.
Ceux-ci ont amené des économies très appréciables d’épaisseur de paroi, donc de poids et de coût, pour une pression de marche donnée.