Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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physique (suite)

La physique statistique*

Les mathématiques ont aussi apporté une large contribution dans le domaine de la physique statistique. Lorsque les systèmes étudiés comportent un très grand nombre de corpuscules indépendants les uns des autres, la détermination de la position et de la vitesse de ces corpuscules est un problème trop compliqué pour être résolu, mais on peut facilement obtenir des valeurs moyennes.

La mécanique statistique classique fut mise au point par Maxwell et Boltzmann* vers 1875. Elle permet d’interpréter les propriétés des gaz (pression sur les parois des récipients, échauffement par compression, chaleur massique, entropie), en admettant que toutes les molécules possèdent la même vitesse moyenne et la même énergie moyenne. Cette énergie peut varier d’une façon continue et peut être utilisée de toutes les manières possibles. Dès la découverte des électrons, Paul Drude (1863-1906) et Lorentz* ont utilisé une méthode analogue pour étudier la conductibilité des métaux ; les ions cristallins du réseau sont maintenus dans des positions fixes en raison de leurs actions mutuelles ; dans leurs intervalles, les électrons de valence sont libres de se déplacer sans être soumis à aucune force ; sous l’action d’un champ électrique , ils seront soumis à une force en admettant que la densité de ce gaz d’électrons est faible, les seules collisions possibles sont celles qui se produisent sur les ions cristallins ; on aboutit ainsi assez facilement à la loi d’Ohm sous sa forme locale entre le vecteur courant et la conductivité σ.

Cette mécanique classique a été remplacée par des mécaniques statistiques quantiques, qui supposent que l’énergie des particules ne peut prendre que des valeurs discrètes. Fondée à la fois sur le principe d’indiscernabilité des molécules et le principe d’exclusion énoncé en 1925 par Pauli, principe selon lequel deux particules ne peuvent avoir exactement le même état quantique, la statistique de Fermi-Dirac, est applicable aux fermions (électrons, protons, neutrons), particules dont les spins sont semi-entiers. La statistique de Bose-Einstein est applicable aux bosons, particules ne suivant pas le principe d’exclusion — telles que le photon — et ayant des spins entiers. Elle permet une bonne interprétation du rayonnement du corps noir.

Ces mécaniques quantiques ont sensiblement amélioré la théorie de la conductibilité des métaux en admettant que les électrons participant à la conduction sont ceux qui sont situés au voisinage du niveau de Fermi et qu’ils ne peuvent se déplacer que dans les limites de certaines bandes d’énergie. On obtient mieux encore en considérant non plus les électrons, mais les ondes qui leur sont associées. Dans le cadre de ces mécaniques statistiques quantiques, l’Américain John Bardeen (né en 1908), prix Nobel en 1956 et en 1972, explique la supraconductivité en admettant qu’aux très basses températures les électrons se déplacent par paires ; l’énergie cédée par l’un d’eux à un noyau au cours d’un choc est récupéré par l’autre : l’énergie totale du couple se conserve ainsi de proche en proche, et la résistance se trouve abolie au sein du métal.

C’est encore par application des mécaniques statistiques quantiques que le physicien soviétique Lev Davidovitch Landau (1908-1968), prix Nobel en 1962, a pu expliquer la superfluidité de l’hélium liquide.


Perspectives d’avenir

Alors que le volume de nos connaissances s’accroissait, on a réduit le nombre de concepts de base de la physique. Peut-on le réduire encore ? Parviendra-t-on à élaborer, comme Einstein a tenté de le faire, une théorie unifiée des champs ?

Pour ce faire et pour élucider bon nombre de questions encore inexpliquées, il faut continuer à expérimenter. La tendance actuelle est de le faire du côté de l’infiniment petit comme du côté de l’infiniment grand, du côté des basses comme du côté des hautes températures, ce qui exige un matériel de plus en plus complexe. Or, la recherche est assujettie à la technique : l’étude des particules a pu être poussée lorsqu’on a su réaliser des chambres à bulles de grand volume. D’autre part, il est exclu que nous puissions mesurer n’importe quelle grandeur avec une précision sans limite, en raison des fluctuations inévitables et en vertu du principe d’incertitude.

Peut-être, pour progresser, faudrait-il modifier notre mode de pensée. Si la physique de l’Antiquité était trop subjective, la physique actuelle ne s’est peut être pas suffisamment libérée de son déterminisme : nous ne pouvons connaître ce qui se passe que statistiquement. Or il y a l’interaction du chercheur et de ce qui l’entoure.

Enfin, nous ne pouvons découvrir un processus que si nous possédons un concept capable de le décrire.

R. D.

 L. de Broglie, Ondes, corpuscules, mécanique ondulatoire (A. Michel, 1949). / P. Guaydier, les Étapes de la physique (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1950 ; 4e éd., Histoire de la physique, 1972). / E. H. Hutten, The Language of Modern Physics (Londres, 1956) ; The Ideas of Physics (Édimbourg, 1967 ; trad. fr. les Concepts de la physique, Dunod, 1969). / R. P. Feynman, Lectures on Physics (Cambridge, Mass., 1963-1965 ; 3 vol.). / U. Filippi, Matière, rayonnement, énergie (Dunod, 1966). / J. M. Irvine, The Basis of Modern Physics (New York, 1967 ; trad. fr. les Bases de la physique moderne, Dunod, 1969). / Physique et chimie. Acquisitions récentes et tendances actuelles (Aubier, 1968). / O. Costa de Beauregard et coll., Relativité et quanta. Les grandes théories de la physique moderne (Masson, 1969). / La Physique (Denoël, 1971).

phytosociologie

Étude des groupements de plantes, ou « associations », qui sont pour elle les unités fondamentales. (Syn. sociologie végétale.)



Historique

Très rapidement, divers points de vue se sont manifestés dans les études du tapis végétal : les uns floristiques, les autres biologiques, les derniers écologiques. Dès le début du xixe s., Alexander von Humboldt* constate que « pour dépeindre les paysages naturels [...] il suffit de discerner un nombre extrêmement restreint de formes fondamentales », et Jules Thurmann (1849) est un des premiers à insister sur les différences entre les notions de flore (énumération et description de toutes les espèces d’une région) et de végétation (tapis végétal formé d’espèces associées suivant des proportions diverses). August Grisebach, en se fondant sur la notion de formation (1938), entreprend en 1872 la publication de l’ouvrage fondamental Die Vegetation der Erde (la Végétation du globe). D’autre part, c’est grâce à Ernst Haeckel que le terme d’écologie* entre dans la terminologie biologique « pour désigner la connaissance des rapports de l’être vivant et de son milieu ». En 1890, Oskar Drude publie un Manuel de géographie botanique, traduit en 1897 en français, et, en 1895, Johannes E. B. Warming un Traité d’écologie, qui a un énorme renom sous le titre d’Ecology of Plants, réédité et adapté de nombreuses fois. Peu après (1898) apparaît l’important ouvrage de Géographie des plantes de Wilhelm Schimper, qui s’inspire des mêmes idées.