Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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photogravure (suite)

Couches sensibles

Pendant longtemps, on employait surtout la couche sensible au collodion : l’opérateur coulait sur une plaque de verre le collodion, dissolution de nitro-cellulose dans un mélange alcool-éther, et le sensibilisait avec de l’iodure et du bromure d’argent. Le collodion a d’abord été remplacé par les plaques sèches, puis par les films au gélatino-bromure, d’emploi beaucoup plus pratique.

La gamme de films pour les arts graphiques est très étendue en sensibilité, depuis les émulsions à faible contraste et à gradation étendue pour les reproductions à modelé continu, ou demi-teintes, jusqu’aux émulsions à contraste extrême pour les reproductions de trait, ou tramées. Les films orthochromatiques conviennent aux reproductions en noir et blanc, et les films ordinaires aux copies de films ; il faut des films panchromatiques pour la sélection des couleurs. Tous ont une couche dorsale antihalo. Leur épaisseur va de 0,06 à 0,2 mm. Pour les travaux exigeant un repérage précis, leur support est dimensionnellement stable et ne varie pas sous l’influence de l’humidité ou de la chaleur. Il existe des films pelliculables, dont la couche sensible peut se détacher du support sous forme de pellicule, des films autopositifs, qui donnent directement un positif sans négatif intermédiaire, des films portant deux émulsions superposées, etc.


Pose et développement

• Les caractéristiques de l’appareil de reproduction (optique, éclairage) et celles de la couche sensible sont connues. On connaît l’échelle de reproduction, les densités que doit avoir un bon négatif ; reste à déterminer le temps de pose. Pour cela, le photographe possède des abaques et des règles à calcul. Il utilise des appareillages qui ont en mémoire les données de base, mesurent les densités de l’original et commandent directement la pose.

• Un premier pas vers l’automatisation du développement a consisté à faire le traitement dans des cuves où les films restaient un temps déterminé, à température constante, dans des bains agités par un soufflage d’azote sous pression afin d’éviter leur oxydation. L’emploi de machines à développer qui avaient fait leurs preuves en photographie industrielle s’est généralisé en photographie de reproduction. Les films sont entraînés mécaniquement dans les bains de développement, de fixage, de lavage et sortent secs. Pour compenser leur usure, leur oxydation, les pertes par entraînement, les bains sont régénérés de façon semi-automatique par l’adjonction de solutions plus concentrées.


Modelé des illustrations

En typographie et en offset, l’encre imprimée a partout la même épaisseur et partout la même intensité de noir. Pour obtenir les demi-teintes, on a imaginé de décomposer la surface imprimante en petits éléments très rapprochés, également noirs, mais plus ou moins grands pour donner à l’œil la sensation d’un ton plus ou moins foncé. C’est ainsi qu’ont opéré les graveurs, puis les dessinateurs lithographes, et c’est ce qu’a fait Firmin Gillot lorsqu’il a mis au point le procédé de décalque d’un dessin lithographique, avec toutes ses finesses et ses pointillés, sur une planche de zinc qu’il mordait à l’acide, obtenant un cliché typographique en demi-teintes. L’invention des trames — trame lignée en 1882 par Georg Meisenbach (1841-1912), trame quadrillée en 1885 par Frederick Eugène Ives (1856-1937) — donna naissance à la photogravure tramée, ou similigravure. La trame est un quadrillage de lignes opaques entourant des petits carrés transparents. On la place devant le film sensible, où chacun des carrés joue le rôle d’un objectif ; la lumière venant de l’original est divisée en une quantité de petits pinceaux lumineux qui produisent sur la couche sensible une série de taches régulièrement espacées, taches d’autant plus larges qu’elles correspondent à une région plus claire de l’original. On obtient ainsi un négatif tramé, à partir duquel on fait un cliché tramé. Les points de ce cliché sont suffisamment espacés pour permettre une impression correcte et suffisamment rapprochés pour que, vu à une certaine distance, l’imprimé donne une sensation de modelé continu. La linéature, ou grosseur de trame, s’exprime en France par le nombre de points au pouce ; une trame 120 a 120 points au pouce, c’est-à-dire au centimètre ; dans d’autres pays, notamment en Allemagne, on indique le nombre de points au centimètre. Le photograveur emploie deux sortes de trames : les trames cristal, en verre gravé, dans l’appareil de reproduction, et les trames à points dégradés, ou trames de contact, pour l’obtention, par contact, de positifs tramés à partir de négatifs à modelé continu.


Retouche

Malgré les efforts de standardisation et d’automatisation, il faut très souvent apporter des retouches pour corriger certains défauts des originaux, pour les interpréter à la demande et pour adapter les valeurs de teintes aux particularités de copie et de gravure ainsi qu’aux conditions d’impression. Suivant les procédés, la retouche est faite soit sur les films négatifs ou positifs, par renforcement ou affaiblissement de l’image argentique, soit sur les clichés en cours de gravure ou après la gravure.


Gravure de clichés typo

Si l’original n’a que des traits ou des textes noirs sur fond blanc, le cliché sera un cliché trait. S’il a des demi-teintes, on utilise la trame et l’on fait un cliché de similigravure, ou cliché simili. Le cliché simili est dit au carré ou cadré quand il est rectangulaire, souvent encadré d’un trait ; il est dit détouré si le fond autour du sujet a été éliminé et dégradé lorsque ce fond va en s’estompant vers les bords.

On peut ajouter à un cliché trait des grisés (points, lignes, grains, trames) par décalque de reliefs de gélatine encrés au rouleau. Les grisés de teinte peuvent être travaillés pour obtenir des transitions dégradées : c’est l’ancien procédé ben-day, appelé aujourd’hui trait modelé. Les opérations de confection des clichés trait ou simili se font dans le même ordre. La planche de métal, zinc pour les travaux courants, cuivre, plus rarement magnésium pour les travaux fins, est recouverte d’une couche sensible constituée par un colloïde bichromate (albumine, colle de poisson, gomme-laque ou émail à froid, alcool polyvinylique). On copie le négatif, on développe par rinçage à l’eau, qui enlève les parties non tannées par la lumière et qui laisse à nu le métal dans ces zones, on renforce par encrage ou par cuisson la résistance des parties de couche restantes et l’on grave par morsure à l’acide, acide nitrique pour le zinc, perchlorure de fer pour le cuivre. On obtient alors des traits et des points, c’est-à-dire une surface imprimante en relief. La difficulté de la gravure réside en ce que chaque élément imprimant doit avoir une structure en coupe pyramidale pour être bien résistant, ce qui oblige à mordre par faibles épaisseurs successives, en protégeant chaque fois les flancs — ou talus — des creux pour éviter l’attaque latérale du mordant. Dans la méthode conventionnelle, le graveur travaille par étapes et fait trois ou quatre morsures successives. La profondeur de creux entre les points d’une similigravure va de 0,03 à 0,15 mm. Le cliché conserve dans les noirs des petits points creux qui seront bouchés par l’encre et dans les blancs des petits points en relief qui empêcheront les rouleaux de déposer de l’encre au fond des creux, mais qui empêchent aussi d’avoir des dégradés de teinte descendant jusqu’au blanc pur. La profondeur de creux des clichés trait est plus grande ; elle est encore accentuée par toupillage ou défonçage après morsure.