Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Arhlabides ou Aghlabides (suite)

La chute des Arhlabides

Mais les exactions des fonctionnaires, ajoutées au faste et à la débauche de la Cour, ne sont pas sans provoquer le mécontentement d’une population par trop puritaine. Au surplus, la milice arabe ne constitue pas un appui sûr pour le régime. C’est pour détourner son activité belliqueuse contre la dynastie que l’émir Ziyādat Allāh Ier (817-838) la lance en 827 contre la Sicile, sous la direction du grand cadi Asad ibn al-Furāt. Palerme est occupée en 831, Messine en 843, mais la conquête de l’île n’est achevée qu’au début du xe s. sous Ibrāhīm II. Ce succès ne consolide pas pour autant le régime arhlabide. Affaibli par une guerre lointaine, privé du djund (troupe permanente au service de l’émir) et des garnisons de frontières, auxquels on substitue une garde prétorienne noire plus fidèle à la dynastie, le régime arhlabide ne résiste pas aux contingents berbères Kutāma que le missionnaire chī‘ite Abū ‘Abd Allāh lance contre Ziyādat Allāh III (903-909). Celui-ci s’enfuit en Orient, abandonnant l’Ifrīqiya aux chī‘ites, qui fondent le régime fāṭimide.

H. M. A.

 E. F. Gautier, l’Islamisation de l’Afrique du Nord. Les siècles obscurs du Maghreb (Payot, 1927). / M. Vonderheyden, la Berbérie orientale sous la dynastie de Benoû’l-Arlab (Geuthner, 1927). / G. Marçais, la Berbérie musulmane et l’Orient au Moyen Âge (Montaigne, 1946).

aride (domaine)

Ensemble des régions caractérisées par l’indigence des précipitations et la faible densité du couvert végétal.


Le domaine aride apparaît en fait fort divers : il inclut aussi bien des déserts tropicaux où le gel, s’il n’est pas inconnu, est rare, que des déserts continentaux à des latitudes parfois élevées (Asie centrale) où le gel est un facteur essentiel de la morphogenèse. Il englobe à la fois des régions hyper-arides, comme le Sahara, où les précipitations sont exceptionnelles, et des régions à aridité saisonnière comme le Sahel africain, où les pluies tombent, en faible quantité certes, mais plus ou moins régulièrement chaque année. Ainsi compris, les milieux arides couvrent près du tiers de la surface des terres.

Malgré les multiples nuances qu’on ne peut manquer de noter dans un domaine aussi vaste, une parenté certaine des traits essentiels de la géomorphologie de toutes les régions arides s’impose néanmoins : partout le même contraste entre d’immenses plaines en pente douce remarquablement planes et des reliefs vigoureux, même lorsqu’ils sont modestes ; partout aussi les mêmes parois rocheuses abruptes, les mêmes tabliers d’éboulis, les mêmes étendues pierreuses désolées, la même maigreur des sols squelettiques ; partout encore les mêmes lits démesurés de cours d’eau le plus souvent à sec. En revanche, le modelé éolien, avec de vastes champs dunaires, n’est vraiment caractéristique que des régions les plus arides.

Ainsi, il existe un modelé aride, dont l’étude peut être regroupée autour de trois thèmes : le modelé des reliefs, le modelé des piémonts et des plaines, le modelé éolien.


Le modelé des reliefs

Qu’il s’agisse de massifs montagneux comme le Hoggar ou de chaînes squelettiques comme l’Atlas saharien, ou encore de simples buttes isolées (Inselberge), les reliefs sont caractérisés avant tout par la raideur des pentes. Les corniches calcaires, quartzitiques ou gréseuses, sont le plus souvent subverticales ; les flancs des dômes cristallins, guidés par des diaclases courbes, dépassent couramment 45°. Si poussée que soit l’évolution, les versants conservent leur raideur. C’est bien là un trait dominant de la géomorphologie aride.

Un examen minutieux de ces parois rocheuses montre qu’elles s’usent lentement par des processus essentiellement mécaniques : desquamation et désagrégation granulaire des roches grenues ; thermoclastie, dont on discute de l’efficacité ; gélifraction, surtout active dans les déserts froids. Toutes ces actions creusent des alvéoles et des taffoni dans les roches cristallines et les grès, démantèlent des pinacles et des clochetons dans les roches tabulaires, rongent des chicots ruiniformes et des crêtes déchiquetées dans les roches redressées. Les débris grossiers vont s’accumuler au pied des versants en des talus d’éboulis de pente accusée (30 à 40°). Les sables sont balayés par les eaux qui ruissellent après les averses brutales, accessoirement par le vent. Sables et éboulis viennent encombrer le lit des oueds, que fréquentent occasionnellement des crues violentes susceptibles d’emporter en quelques heures des masses considérables de débris.

Les roches meubles sont vigoureusement érodées par le ruissellement, qui, lorsque les matériaux sont assez fins pour qu’il puisse les prendre en charge, creuse des réseaux très ramifiés et bien hiérarchisés de ravins en miniature, les bad lands. Ce contraste entre la rapide usure des roches meubles et la lenteur du recul des parois rocheuses explique la particulière netteté des formes structurales. Les roches cohérentes sont nettoyées minutieusement sans subir la moindre entaille : les surfaces structurales, notamment les hamadas subhorizontales, y atteignent de ce fait une perfection inconnue ailleurs. Les escarpements monoclinaux y sont caractérisés par des corniches vigoureuses et des profils tendus. Les moindres nuances lithologiques sont mises en valeur sous forme de replats ou, sur le flanc des anticlinaux, de chevrons finement ciselés.

Tous ces traits s’expliquent par la prépondérance de deux processus.


La désagrégation mécanique des roches

L’eau n’est pas absente : aux averses sporadiques s’ajoutent en effet les rosées abondantes que provoque le brusque refroidissement nocturne. Mais elle ne séjourne pas assez longtemps dans les roches pour y exercer une action chimique poussée. Elle pénètre par les fissures que lui ouvrent les tensions mécaniques liées aux amples variations thermiques, que favorisent la sécheresse de l’air et le manque de protection des roches. Son action est essentiellement mécanique : éclatement par le gel ; gonflement des minéraux hygrophiles ; pression déployée par la cristallisation des sels. L’action chimique n’est pourtant pas négligeable : on note sur la face interne des écailles de desquamation un début d’altération argileuse de type montmorillonitique. Mais cette attaque dépasse rarement le stade d’une simple dissolution, dont les vermiculures dues à la rosée constituent un exemple original. Les substances dissoutes ne sont jamais entraînées bien loin : ainsi s’expliquent les patines et vernis, qui sont des précipitations souvent riches en fer et en manganèse déposées à la surface de la roche par évaporation. Ainsi s’expliquent aussi les croûtes et les encroûtements calcaires ou gypseux qui se forment à faible profondeur, et qui témoignent de migrations verticales, par infiltration ou évaporation, et latérales des solutions.