Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

périglaciaire (suite)

• Le dégel saisonnier libère de grandes quantités d’eau qui imbibent profondément les sols riches en matrice fine. Ceux-ci tendent à glisser lentement sur les pentes d’autant plus facilement que le gel a modifié l’état des colloïdes, diminuant leur cohésion. C’est le phénomène de gélifluxion, dont les modalités dépendent de la topographie et du couvert végétal tout autant que de la texture et de l’épaisseur du matériel : loupes de gélifluxion, coulées boueuses, coulées de blocaille, nappes de gélifluxion...

Combinée à des processus non spécifiques des milieux périglaciaires (ruissellement, éboulis de gravité...), l’action du gel et du dégel modèle des formes de versants caractéristiques. On peut les regrouper en trois grands types :

• Les versants de gélivation sont façonnés par la gélifraction d’une paroi rocheuse au pied de laquelle les débris s’accumulent par gravité en cônes ou tabliers d’éboulis. Au départ, la gélifraction progressant plus vite dans les zones les plus gélives, il se forme des niches de gélivation qui, en se développant, finissent par ne plus laisser subsister que des pinacles résiduels qui disparaissent à leur tour. Ainsi se réalisent des versants réglés à profil rectiligne d’une pente généralement inférieure à 30° dans le prolongement des éboulis. Ceux-ci sont parfois formés d’une alternance de lits grossiers et de lits fins : ce sont des éboulis ordonnés, ou, lorsque les débris n’excèdent pas quelques centimètres, des grèzes. Leur pente, plus faible que celle des éboulis purs, résulte de remaniements par la solifluxion et le ruissellement des eaux de fusion nivale.

• Les versants de gélifluxion se développent dans les roches qui libèrent une quantité suffisante de débris fins pour permettre le lent glissement des matériaux. Le plus souvent, ces versants présentent une topographie de détail bosselée plus ou moins chaotique due à la juxtaposition et à la superposition de coulées ou loupes localisées. D’autres montrent une multitude de gradins de petites dimensions (terrassettes, pieds de vache). En revanche, dans les roches très gélives comme la craie en Champagne, la gélifluxion généralisée a modelé des versants d’une grande régularité et de pente très faible (de 2 à 3°).

• Les versants à replats « goletz », décrits par les auteurs soviétiques, sont caractérisés par la superposition de vastes replats subhorizontaux limités par des talus assez raides. Ces talus sont formés d’un matériel grossier que les eaux de ruissellement lavent de leurs débris fins, lesquels sont étalés sur les paliers où se forment des sols géliturbés.

Dans tous les cas, des masses considérables de débris sont acheminées au pied des versants, où ils empâtent le fond des vallées. Dans les vallons, les eaux se perdent dans ces nappes détritiques qui déterminent un profil en berceau ; dans les vallées suffisamment importantes pour être parcourues par des écoulements saisonniers, des eaux divagantes remanient ces débris et modèlent, en les étalant, des vallées à fond plat. Au débouché des reliefs, les rivières accumulent sur les piémonts des cônes détritiques aplatis qui, par coalescence, peuvent former de véritables glacis de remblaiement. Enfin, les très grands fleuves des plaines arctiques qui dégèlent plus tôt à l’amont qu’à l’aval du fait de leur tracé sud-nord ont leur flot bloqué par les embâcles de glace ; lorsque ces barrages cèdent, de brutales chasses d’eau armées de glaces flottantes sapent les berges, débordent sur les plaines et épandent sur d’immenses surfaces des limons au sein desquels de gros blocs insolites sont abandonnés par des radeaux de glace en fusion. Tous ces dépôts fossilisent des mares gelées, des coins de glace, qui, lorsqu’ils fondent ultérieurement, provoquent des effondrements. Il en résulte une topographie chaotique : le cryokarst (ou thermokarst).

La médiocrité de l’écran végétal dans les climats froids et secs, l’abondance des débris fins étalés au front des glaciers par les eaux proglaciaires et aussi les sables dégagés sur les estrans par l’abaissement du niveau des mers lors des phases froides du Quaternaire expliquent le rôle important du vent dans le système morphogénétique périglaciaire. La déflation éolienne prend en charge des sables et des limons, laissant sur place des champs pierreux ; les éléments sableux sont assez vite redéposés, souvent en nappes informes, parfois sous forme de dunes, d’autres fois mêlés à la neige (dépôts nivo-éoliens). Les éléments les plus fins cheminent davantage avant d’être piégés par la végétation steppique, enveloppant les reliefs d’un manteau lœssique d’une épaisseur de quelques mètres au maximum, variable suivant la topographie.

R. L.

 J. Tricart et A. Cailleux, Traité de géomorphologie, t. II : le Modelé des régions périglaciaires (Sedes, 1968). / L.-E. Hamelin et F. Cook, le Périglaciaire par l’image (Presses de l’université Laval, Québec, 1970).

Périgueux

Ch.-l. de la Dordogne ; 37 670 hab.


Périgueux, noyau d’une agglomération de 60 000 habitants, est située dans la vallée de l’Isle entre le confluent du Manoire, que suivent la route et la voie ferrée de Brive, et celui du ruisseau de Beauronne, emprunté par la route d’Angoulême. À 86 m d’altitude, la ville est dominée par des plateaux boisés situés vers 180 à 200 m.

Le centre s’identifie avec la ville médiévale, l’ancien Puy-Saint-Front, édifié à partir du xie s. autour du tombeau de l’apôtre du Périgord. Il s’étend sur un replat à 30-40 m au-dessus de l’Isle, sur le rebord duquel fut construite la cathédrale romane Saint-Front, dont les élégantes coupoles dominent l’Isle. Dans cette ville ancienne, les vieilles maisons, dont certaines datent du xvie s., offrent un intérêt archéologique certain. Elles se pressent les unes contre les autres et ont accueilli, au rez-de-chaussée, de nombreux commerces de détail. La circulation serait difficile dans ces vieux quartiers si des rues plus larges n’avaient été percées au xixe s. jusqu’à la place de la Cathédrale. Autour du centre, de larges artères, très animées, ont été percées au xviiie s. sur l’emplacement des murailles médiévales (cours Fénelon, cours et place Montaigne, allées de Tourny). Au sud-ouest de la place Francheville, qui fut longtemps un terrain vague, la cité administrative et des casernes s’intercalent dans des quartiers résidentiels calmes que borde l’Isle au sud et autour de l’ancien port fluvial. C’est la « cité », construite sur l’emplacement de la Vésone gallo-romaine et dont les restes de muraille, la tour de Vésone et l’église romane Saint-Étienne soulignent toutes les richesses du passé. La construction (en 1856) du chemin de fer de Coutras à Périgueux, l’édification des ateliers ferroviaires marquèrent pendant plus d’un demi-siècle les limites de l’agglomération.