Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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pèlerinage (suite)

Lui, du moins, savait que ce n’était pas recours « magique » de la part de cette femme : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. » Si, d’ailleurs, la guérison était le but de leur pèlerinage, les milliers de malades qui repartent de Lourdes sans amélioration notable seraient-ils si rayonnants ? C’est leur contact qui a été l’occasion de la conversion d’une Renée Massip, élevée dans les préceptes les plus stricts du laïcisme (cf. son émouvant témoignage dans le Rire de Sara, 1966). Encore moins le pèlerinage est-il une idolâtrie ! Celle que viennent prier les millions de pèlerins à Lourdes, c’est la « Sainte Vierge » ! À qui ferait-on croire que c’est la statue ? Ici encore, le passé nous offre le précédent des sages remontrances que le vieux moine Auger fait à Bernard d’Angers, frais émoulu des écoles de Chartres, très fier de sa jeune science et horrifié devant l’« idole » de sainte Foy à Conques : « On la vénère pour glorifier Dieu », qui a conduit la martyre à cette sainteté.

Au début de l’Annonce faite à Marie, Anne Vercors explique ainsi pourquoi il veut laisser sa famille et partir pour la Terre sainte : « Nous sommes trop heureux. Et les autres pas assez. » On trouve cette même réciprocité, cette « communion des saints » et des services dans l’islām, comme dans le simple « j’irai prier pour vous devant la grotte » des plus humbles pèlerins de Lourdes.

Les pèlerins forment une communauté : « Je ne suis pas seul, poursuit Anne Vercors, les voilà tous en marche avec moi, toutes ces âmes, les uns qui me poussent et les autres qui m’entraînent et les autres qui me tiennent la main. » S’il est une manifestation de masse, n’est-ce pas le pèlerinage ? Là le croyant se sent chez lui, avec une religion qui lui convient, à laquelle il peut participer à pleine gorge et de plein cœur. Où donc, au surplus, trouverait-on une telle égalité, une telle fusion des classes et de tout ce qui, d’ordinaire, sépare les hommes ?

Quant aux fruits du pèlerinage, c’est pour le croyant qui y participe la purification (que recherchent aussi bien les hindous, les musulmans que le « pèlerinage pénitentiel » cher à la chrétienté médiévale), la prière, la foi et la joie. Mais c’est surtout pour lui l’approche symbolique de sa véritable orientation : le pèlerinage éclaire l’exercice de sa vie terrestre en lui rappelant « où il va ».

C. J.-N.

 L. de Sivry et M. Champagnac, Dictionnaire géographique, historique, descriptif, archéologique des pèlerinages anciens et modernes et des lieux de dévotion les plus célèbres de l’univers (Migne, 1850-51 ; 2 vol.). / M. Delcourt, les Grands Sanctuaires de la Grèce (P. U. F., 1947). / L. Vasquez de Parcal, J. M. Lacarra et J. Uria, Las peregrinaciones a Santiago de Compostela (Madrid, 1948-49 ; 3 vol.). / B. Kötting, Peregrinatio religiosa. Wallfahrten in der Antike und das Pilgerwesen in der alten Kirche (Ratisbonne et Münster, 1950). / Les Pèlerinages (Éd. du Seuil, 1960). / R. Laurentin, Lourdes, histoire authentique des apparitions (Œuvres de la Grotte, Lourdes, et Lethielleux, 1961-1966 ; 7 vol.). / C. Barthas, Fatima, 1917-1968 (Fatima Éditions, Toulouse, 1969). / R. Laurentin et A. Durand, Pontmain. Histoire authentique (Apostolat des éditions, 1970 ; 3 vol.). / C. Spicq, Vie chrétienne et pérégrination selon le Nouveau Testament (Éd. du Cerf, 1972). / Les Pèlerinages (Geuthner, 1975).

Péloponnèse

Péninsule montagneuse et digitée séparée de la Grèce continentale par l’isthme de Corinthe ; 21 500 km2 ; 1 million d’habitants.



La géographie

Bien qu’elles couvrent la majeure partie du Péloponnèse, les montagnes n’en sont plus l’élément le plus utile : les hommes et les activités économiques se concentrent dans des plaines, qui connaissent (à l’exception du poljé intérieur de Trípolis) des hivers très doux et qui pourraient mieux profiter pendant les étés chauds et secs de l’eau restituée par les massifs montagneux.

La colonisation des plaines contribua, dès le xixe s., à déséquilibrer l’économie, fondée sur la céréaliculture vivrière, l’élevage du petit bétail et l’oléiculture, et qui associait dans plusieurs cantons villages permanents d’altitude et hameaux saisonniers de plaine ou de bord de mer. L’exode rural, accéléré par la croissance d’Athènes*, et l’émigration vers l’étranger, souvent rendue inévitable par la médiocrité des niveaux de vie, ont contribué ensuite à l’abandon des cantons les plus pauvres ou les plus malaisés d’accès. Ce double mouvement affecte désormais les plaines.

L’allure prospère des vignobles à vin ou à raisins secs, des oliveraies, des vergers d’agrumes, des cultures légumières de plein champ, qui furent créés pour répondre à la demande des marchés d’Athènes ou d’Europe, ne doit pas faire illusion : la motorisation, l’irrigation, le développement des coopératives, la multiplication des petites conserveries ne pourraient jouer leur rôle que si les exploitations agricoles étaient remembrées et agrandies.

L’amélioration de la desserte routière favorise l’installation d’entreprises touristiques, surtout dans le Nord et spécialement dans les petites îles de Spétsai et d’Hydra. Mais les bénéfices de ce commerce, qui est dirigé depuis Athènes, profitent peu à la population locale.

L’influence de Patras (120 000 hab.) se développe sur toute la façade ouest de la Grèce. Patras est la seule ville de la péninsule à disposer d’établissements industriels de plus de 500 salariés (textile, pneumatiques, alimentation), mais son port n’a qu’une activité dérisoire en dépit de la proximité de l’Europe occidentale. Kalamáta, avec 40 000 habitants et une usine de cigarettes, n’est qu’une grosse bourgade éloignée. La population des autres villes (Aighion, Pýrghos, Trípolis, Árghos [ou Argos], Corinthe) est de l’ordre de 20 000 habitants : ces villes sont de petits centres commerciaux peu dynamiques, sauf Aighion, qui a quelques usines bien placées sur la nouvelle route littorale du Nord, et Árghos, qui domine une active huerta. Mais Athènes les écrase toutes de son influence sans partage. Progressivement abandonné par sa population rurale, le Péloponnèse ne dispose ni d’un réseau urbain ni d’un équipement industriel capables de retenir celle-ci. L’électricité, produite grâce au lignite de Meghalópolis, est aussi destinée à Athènes.

P.-Y. P.