Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pays-Bas (royaume des) (suite)

Les institutions

Les Pays-Bas ont renversé l’ordre habituel de l’évolution constitutionnelle ; ils étaient une république avant de devenir un royaume. Cette originalité a marqué les institutions du pays, qui a dû concilier la nécessité d’un pouvoir fort, seul capable de réaliser l’unité, avec la tradition d’autonomie des provinces. Monarchie parlementaire et État unitaire, les Pays-Bas ont concilié ces exigences.

Le texte de base est la Constitution, qui, promulguée en 1815, a été plusieurs fois remaniée depuis. D’autre part, à partir de 1954, le « Statut du royaume des Pays-Bas » a régi, outre les Pays-Bas, le Surinam* et les Antilles* néerlandaises ; en 1975, la décision du Surinam de devenir république indépendante a remis en question ce Statut.

La monarchie est héréditaire aux Pays-Bas. La succession à la Couronne se fait en ligne directe par droit de primogéniture avec priorité aux hommes. Conçues d’abord comme une monarchie constitutionnelle fondée sur un pouvoir fort du roi, les institutions des Pays-Bas s’ouvrent au parlementarisme en 1848 avec la grande révision constitutionnelle qui pose que « le souverain est inviolable, les ministres sont responsables ».


Le pouvoir exécutif

Ainsi, le pouvoir exécutif, détenu en droit par le souverain, est exercé en fait par les ministres, qui contresignent tous les arrêtés royaux.

La Constitution donne au souverain tous les pouvoirs d’un chef d’État. Chef des forces armées, chargé de la conduite des affaires extérieures et de la conclusion des traités, nommant aux plus hautes fonctions, il détient aussi une partie du pouvoir législatif. Pour l’aider, il dispose d’un Conseil d’État (Raad van State), qu’il préside et dont il nomme les membres : 20 au maximum. Consulté sur les projets de loi avant leur soumission au Parlement ou émanant de celui-ci, sur les projets de règlements d’administration publique, sur les recours administratifs que doit trancher la Couronne et sur toute affaire où le souverain le juge utile, le Conseil d’État peut exercer l’autorité royale dans certains cas exceptionnels.

Les ministres sont regroupés dans le Conseil des ministres (Ministerraad), qui, bien que la Constitution n’en parle pas, exerce la réalité du pouvoir gouvernemental* et comprend : le président du Conseil des ministres, qui, non prévu en 1815, est peu à peu devenu un véritable Premier ministre ; désigné par le souverain, il a souvent été d’abord le « formateur » auquel le monarque s’est adressé pour constituer le cabinet ; les ministres, avec ou sans portefeuille ; (depuis 1948) des secrétaires d’État, peuvent être invités au Conseil, avec voix consultative. À ce Conseil des ministres s’adjoignaient les ministres plénipotentiaires du Surinam et des Antilles néerlandaises pour former le Conseil des ministres du royaume.

Ainsi, la Couronne a perdu l’essentiel de ses pouvoirs. En fait, la reine Juliana bénéficie de l’attachement traditionnel porté par les Pays-Bas à la maison d’Orange. Surtout, le souverain dispose, corollaire de la responsabilité de ses ministres, du droit de dissoudre le Parlement*.


Le Parlement

Ayant conservé leur nom en souvenir de la république, les États généraux (Staten-General) ne peuvent plus être assimilés à un « collège d’ambassadeurs » des provinces. Représentant tout le peuple des Pays-Bas, ils sont un véritable Parlement qui exerce le pouvoir législatif conjointement avec la Couronne et contrôle les actes du gouvernement.

La « deuxième Chambre » (Tweede Kamer) prime en réalité la première. Formée depuis 1956 de 150 membres élus pour 4 ans au suffrage universel direct (suivant le système de la représentation proportionnelle, depuis 1917), elle a le droit d’amender les projets de loi qui lui sont transmis par le souverain et possède un droit d’initiative législative rarement utilisé. La « première Chambre » (Eerste Kamer), formée de 75 membres élus pour 6 ans par les États des provinces et renouvelables tous les 3 ans, correspond au Sénat français. Elle ne peut qu’approuver ou rejeter les projets de loi que lui transmet la seconde Chambre. Siégeant pratiquement sans interruption, les Chambres ne votent jamais de motions de confiance, mais utilisent leur droit d’enquête et d’interpellation.

Les États généraux devenaient le Parlement du royaume quand ils coopéraient avec la Couronne pour élaborer les lois qui s’appliquaient aussi au Surinam et aux Antilles néerlandaises. Les ministres plénipotentiaires et les délégués spéciaux des deux États d’outre-mer assistaient alors aux débats.


Un État unitaire centralisé fondé sur l’autonomie

Conçue comme le moyen de réaliser l’unité, la centralisation n’empêche pas les Pays-Bas d’avoir une organisation locale très structurée fondée sur le principe d’autonomie.

• Les provinces. Conçues en 1815 comme de simples unités administratives peu susceptibles de s’opposer à l’autorité du souverain, les 11 provinces des Pays-Bas ont graduellement reconquis une partie des pouvoirs qui étaient les leurs sous la république. La loi sur les provinces (1962) entérine cette évolution, commencée en 1848.

Représentant la population de la province, les états provinciaux (Provinciale Staten) sont chargés de l’administration provinciale. Leurs membres, dont le nombre varie de 39 à 83 suivant la population de la province, sont élus pour 4 ans au suffrage universel suivant le système de la représentation proportionnelle. Leurs règlements doivent être approuvés par le souverain, qui ne peut s’y opposer sans décret motivé. Dans l’intervalle des sessions, les états provinciaux nomment en leur sein une commission permanente de 6 membres, les états députés (Gedeputeerde Staten), chargés d’exécuter les affaires courantes.

Nommé par la Couronne, le commissaire de la reine (Commissaris der Koningin) est le véritable dirigeant de la province. Il préside les états provinciaux et les états députés et est responsable du maintien de l’ordre public dans sa province.