Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pays-Bas (royaume des) (suite)

L’organisation de l’économie et la situation actuelle

Le libre jeu des forces économiques et le respect de l’initiative privée constituent toujours les principes de base de gouvernements généralement orientés à droite ou au centre sur le plan politique. Cela ne signifie pas que l’État reste passif, mais il préfère agir par incitation plutôt que par contrainte, et laisser les intéressés réglementer eux-mêmes les professions et négocier entre eux la solution des conflits sociaux. Une tradition de législation économique urbaine, les nécessités des périodes de guerre et de crise économique, la mise en œuvre de grands travaux et la crainte du chômage ont néanmoins favorisé une série d’interventions qui se marquent par le contrôle étroit de certaines activités comme les transports et le commerce, et l’injection de capitaux publics dans de nombreuses branches, où l’État se trouve toutefois rarement en position de monopole. Le coût des aides à l’industrialisation, de la construction de l’infrastructure routière et portuaire, des aménagements du Zuiderzee et du « Delta » se traduit par une lourde pression fiscale où l’imposition directe tient une place plus importante qu’en France.

Jusqu’il y a quelques années, la situation sociale se caractérisait par un calme relatif, des grèves peu fréquentes et une augmentation modérée des salaires et des prix ; en 1965 encore, le niveau de vie était sensiblement plus bas que celui des pays voisins, et le touriste français, anglais ou allemand pouvait séjourner à bon compte aux Pays-Bas. Il n’en va plus de même aujourd’hui ; des difficultés économiques déterminant la fermeture de plusieurs établissements industriels importants et une combativité plus grande des syndicats ouvriers entraînèrent des remous sociaux et, en septembre 1972, la première grève avec occupation d’usine (à la suite de l’annonce par AKZO de la cessation d’activité de son usine de Breda). En 1974, la situation se caractérise par une hausse rapide des salaires et des prix qui toutefois, n’étant pas plus élevée que dans la plupart des autres pays ouest-européens, influe peu sur la compétitivité des exportations. Plus prudents que par le passé, les capitalistes étrangers continuent cependant leurs placements aux Pays-Bas et les achats de valeurs à la Bourse d’Amsterdam se poursuivent. D’autre part, le florin reste une monnaie presque aussi forte que le mark. On ne saurait parler d’une crise économique profonde, mais plutôt d’une incertitude générale quant à l’avenir, qui se manifeste dans de nombreux domaines (25 000 chômeurs en 1963, 105 000 fin 1972, plus de 2 p. 100 de la population active).

Ces soucis conjoncturels se doublent d’un problème permanent : celui du manque d’espace. Les Pays-Bas sont parmi les premiers en Europe à avoir tenté d’empêcher la prolifération anarchique des villes et à avoir veillé à la préservation du milieu naturel ; mais les citadins ont besoin de superficies de plus en plus vastes pour leurs loisirs, tandis que l’urbanisation et l’industrialisation dévorent chaque année des milliers d’hectares de terres agricoles. À une croissance urbaine planifiée et au maintien de « zones vertes » se sont ajoutés une réglementation très stricte de l’établissement des résidences secondaires et un recensement des espaces de loisirs disponibles ; ceux-ci se font rares dans plusieurs régions, surtout si l’on défalque les propriétés privées, les terrains militaires et l’essentiel du cordon dunaire, dont la protection est nécessaire pour des raisons d’ordre hydrologique et zoologique. L’utilisation prévue des polders du sud du Zuiderzee (Flevoland-Méridional et Markerwaard) permet heureusement d’envisager le moyen terme sans trop d’appréhensions.

Le niveau de vie

Produit national brut par habitant : 4 000 dollars.

Consommation d’électricité par habitant : 4 000 kWh.

Téléviseurs pour 1 000 habitants : 285.

Automobiles particulières pour 1 000 habitants : 240.

Ce dernier taux, qui peut paraître faible, témoigne pourtant d’une croissance très rapide (nettement supérieure à celle du niveau de vie) depuis quelques années : il n’était en 1963 que de 72 p. 1 000. La bicyclette, puis le vélomoteur ont longtemps paru suffisants aux Néerlandais pour accomplir les courtes distances séparant la résidence du lieu de travail ou des espaces de loisirs dominicaux ; la vogue de la voiture particulière pose non seulement de graves problèmes d’engorgement du réseau routier, mais modifie aussi les habitudes d’achat au profit des centres commerciaux suburbains facilement accessibles et pourvus de vastes parkings.

Ces indications globales masquent de fortes disparités régionales ; l’écart entre le revenu par tête de la province la plus « pauvre » (Frise) et celui de la province la plus « riche » (Hollande-Septentrionale) atteint déjà le rapport de 1 à presque 1,4 ; les variations intercommunales sont évidemment beaucoup plus importantes : rapport de 1 à plus de 4. On trouve les revenus moyens les plus élevés non pas dans les grandes villes, mais dans les communes suburbaines de résidence aisée, en particulier en Hollande et en Utrecht, les revenus les plus bas, dans certaines communes rurales des provinces périphériques. La sensible augmentation récente du niveau de vie n’a pas présenté partout la même ampleur : elle a souvent abouti à une réduction des écarts interrégionaux (indice d’un succès relatif de la politique d’industrialisation), mais aussi souligné les difficultés économiques actuelles des foyers d’industries traditionnelles.

J.-C. B.

➙ Amsterdam / Brabant-Septentrional / Delft / Delta (plan) / Frise / Groningue / Gueldre / Haarlem / Haye (La) / Limbourg / Overijssel / Rotterdam / Randstad Holland / Utrecht / Zuiderzee.

 P. Wagret, les Polders (Dunod, 1959) / A. Gamblin, Géographie du Benelux (C. D. U. 1960 ; nouv. éd., 1965-1970, 5 vol.) / C. Chaline, F. Rogé et P. George, l’Europe des marchands et des navigateurs (P. U. F., 1965) / Second Rapport relatif à l’aménagement du territoire des Pays-Bas (La Haye, 1966) / G. Burke, Greenheart Metropolis (Londres, 1966) / P. George et R. Sevrin, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg (P. U. F., coll. « Magellan », 1967) / E. Juillard, l’Europe rhénane (A. Colin, 1968). / R. Sevrin, Géographie de la Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1969) / A. M. Lambert, The Making of the Dutch Landscape (Londres et New York, 1971).
On peut aussi consulter les publications du Bureau central de statistique de La Haye.