Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pays-Bas (royaume des) (suite)

La population compte à peine 36 p. 100 d’actifs, à cause d’une faible extension du travail féminin. L’agriculture, encore dominante en 1900, n’occupe plus que de 7 à 8 p. 100 de la population active ; le secteur tertiaire rassemble à lui seul plus de la moitié de celle-ci et témoigne du rôle international des grandes villes de l’Ouest dans le domaine commercial et financier. Les Pays-Bas sont aussi devenus au xxe s. une nation industrielle, la part du secteur secondaire dans l’emploi plafonnant actuellement aux environs de 40 p. 100, les « dégagements » dans les branches traditionnelles (charbon, textile) compensant les progrès de la chimie et de l’électronique.


L’économie


L’agriculture et la pêche

En dépit de sa célébrité, l’agriculture ne joue plus aujourd’hui qu’un rôle de second plan dans l’économie (moins de 6 p. 100 du produit national brut). Jusqu’à une époque récente, la superficie agricole a beaucoup augmenté, tant par la poldérisation que par le défrichement ; les terres incultes, qui s’étendaient encore sur 900 000 ha en 1833, en occupent moins de 250 000 aujourd’hui ; une partie a été reboisée, la forêt ne couvrant cependant que 8 p. 100 environ de la surface totale du pays. Depuis la Seconde Guerre mondiale, les principaux gains de terres agricoles proviennent de l’assèchement du Zuiderzee, mais sont largement compensés par la soustraction à l’agriculture des superficies destinées à l’urbanisation, à l’industrialisation et aux voies de communication (10 000 ha par an en moyenne) : dans cet État très densément peuplé, la diminution de l’espace rural apparaît désormais inévitable.

Il y a longtemps que les Pays-Bas n’assurent plus la couverture de leurs besoins en céréales puisque, dès le Moyen Âge, ils devaient en importer des pays riverains de la Baltique. Mais la grande crise des années 1880 a précipité la spécialisation dans des productions exportables pour lesquelles la concurrence des pays neufs ne se faisait pas trop sentir : les produits laitiers, de réputation très ancienne en Hollande et en Frise, les fruits, les légumes et les fleurs, entrés dans les circuits commerciaux à partir du xviie s. Cette évolution s’accompagne d’une recherche du rendement et de la productivité, appuyée sur l’usage massif des engrais, une mécanisation poussée et la réduction des frais de main-d’œuvre ; mais la petite taille des exploitations (13 ha en moyenne, horticulture exclue) reste un handicap sérieux malgré une amélioration récente en partie due au lotissement des nouveaux polders. C’est surtout dans le domaine de la commercialisation et de la transformation des produits que se marque le dynamisme de l’agriculture, par une attention très vive accordée aux conditions du marché, un soutien constant (mais généralement indirect) du gouvernement, l’organisation en coopératives et en groupements verticaux associant production, commerce et traitement industriel des denrées. « Toute l’activité agricole est mise en chiffres, en fiches, en bandes. Place aux ordinateurs qui, jusque dans les coopératives, dictent par le menu les décisions opportunes. Point de concession à l’improvisation, au corporatisme, aux querelles d’idées. Un seul objectif à court et à long terme : exporter davantage... » (P. M. Doutrelant). La description ne vaut que pour certaines branches, mais là, elle n’a rien d’exagéré. Le gouvernement n’a pas voulu s’engager dans une politique de subventions, coûteuse pour le budget national et risquant d’assoupir le monde rural dans une fausse sécurité ; en revanche, il n’a pas ménagé ses efforts pour impulser le développement de l’enseignement professionnel (il existe même une « université » agricole à Wageningen) et des fermes pilotes, et la création d’un corps de conseillers agricoles ; en général, il préfère laisser l’initiative aux producteurs eux-mêmes, à partir du moment où ils sont suffisamment organisés. C’est le cas dans la production laitière (trois associations de vente assurent plus de 50 p. 100 des exportations néerlandaises de beurre et de fromage) et dans l’horticulture, où les célèbres veilingen (ventes publiques) permettent la confrontation rapide de l’offre et de la demande et interviennent éventuellement sur les cours par le retrait des excédents du marché. Ces associations peuvent supporter les frais élevés de campagnes publicitaires à l’étranger, par affiches, spots télévisés et « promotion » sur les lieux de vente : non seulement en France (le « fromage de Hollande »), mais aussi en Allemagne fédérale, en Grande-Bretagne, en Suède, en Suisse, l’attention du consommateur est attirée sur les produits de l’horticulture et de l’élevage néerlandais. La situation n’est pas excellente pour autant dans toutes les branches : d’autres nations (Danemark, pays de l’Est européen, Israël, etc.) ont suivi l’exemple des Pays-Bas pour certaines spécialités et leur disputent maintenant les débouchés étrangers ; d’autre part, les problèmes généraux des irrégularités de la production face à une consommation peu élastique et du retard de la croissance des prix agricoles par rapport aux prix industriels n’épargnent pas l’agriculture néerlandaise malgré la présence de nombreux mécanismes de sauvegarde. Il apparaît cependant remarquable que les Pays-Bas aient conservé une agriculture active qui ne soit pas un gouffre budgétaire et dont les produits, bruts ou transformés, constituent près du quart de la valeur des exportations.

L’histoire récente de l’agriculture montre une extension des prairies (63 p. 100 de la superficie agricole utile aujourd’hui) et de l’horticulture (5 p. 100) aux dépens des labours (32 p. 100). Ceux-ci n’occupent qu’une faible place dans les régions argileuses, sauf en Zélande, en Groningue et dans les polders récents au drainage profond ; le paysage hollandais le plus fréquent est celui que l’on voit tout au long de l’autoroute La Haye-Utrecht : de longues parcelles laniérées bordées de canaux, où paissent les fameuses vaches noir et blanc de race frisonne ; ici dominent le fermage et la moyenne exploitation. Les terres sableuses présentent plus de variété : alors qu’aux environs des villages les labours dominent dans la partie ancienne du finage, les fonds humides et les espaces de défrichement récent sont généralement utilisés en prairies, qui traduisent les progrès de l’élevage dans des régions traditionnellement vouées à la polyculture céréalière et où la petite exploitation en faire-valoir direct reste la règle. Une partie des cultures elles-mêmes (pomme de terre, plantes fourragères) sert à alimenter le bétail, notamment les porcs. L’horticulture est soumise à des facteurs de localisation plus précis, qui tiennent à la proximité des centres de consommation plutôt qu’à la nature des sols ; les cultures légumières et florales tendent cependant à se répandre en dehors de leurs foyers hollandais traditionnels (en particulier le Westland et les environs de Haarlem), tandis que les vergers tiennent depuis longtemps une place importante en Zélande, en Betuwe et dans le Limbourg méridional.