Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Paris (suite)

Dans ces églises, la sculpture, surtout funéraire, tient — ou tenait — une place non négligeable. Plus importante fut cependant celle de la peinture, grâce à d’innombrables tableaux d’autels, panneaux de lambris, décorations murales, souvent dispersés ou perdus depuis la Révolution et qui avaient pour auteurs Vignon*, Vouet, Champaigne, La Hire*, Le Sueur*, Le Nain*, Le Brun, etc. Il faut ajouter d’autres aspects des arts de la couleur : vitraux à Saint-Eustache et à Saint-Étienne-du-Mont, tapisseries tissées par les ateliers parisiens pour Notre-Dame et pour Saint-Gervais.


Paris sous le règne personnel de Louis XIV

Malgré la prédilection du roi pour Versailles, Paris doit à son initiative, et à celle des serviteurs de la monarchie, un ensemble monumental qu’inspire le sens de la grandeur. Un nouveau Louvre prend forme. De 1645 à 1664, Le Vau achève le quadruplement de la cour Carrée. Divers projets et controverses pour la façade extérieure est aboutissent à la colonnade de Perrault*. Incendiée en 1661, la Petite Galerie est refaite par Le Vau ; elle devient la galerie d’Apollon, au plafond peint sous la direction de Le Brun. Mais le Louvre perdra bientôt sa fonction de résidence royale. Le palais des Tuileries est remanié en 1664 par Le Vau, en harmonie avec son jardin refait par Le Nôtre*. En exécution du testament de Mazarin, Le Vau élève face au Louvre, à partir de 1663, le collège des Quatre-Nations (auj. Institut de France), avec ses deux pavillons à ordre colossal, ses deux ailes incurvées, sa chapelle centrale à coupole où prendra place le tombeau du cardinal, sculpté par Antoine Coysevox (1640-1720) et Jean-Baptiste Tubi (1635-1700).

La gloire du règne s’exprime aussi dans de grandes entreprises publiques. L’Observatoire est commencé en 1668 sur les dessins de Perrault. Le Vau et Le Muet collaborent à l’hôpital de la Salpêtrière, dont Libéral Bruant (1635-1697) élève en 1670 la chapelle en croix grecque. Au même architecte, on doit les plans — rappelant l’Escorial par la disposition des cours — de l’hôtel royal des Invalides*, bâti de 1671 à 1676 dans un genre sévère et grandiose. Des opérations d’urbanisme fixent le nouveau visage de la capitale. Face aux Tuileries, Le Nôtre trace la promenade des Champs-Élysées. Les remparts de la rive droite font place à des boulevards plantés d’arbres ; deux des anciennes portes sont reconstruites en forme d’arc de triomphe : la porte Saint-Denis (1672) par François Blondel (1618-1686), la porte Saint-Martin (1674) par Pierre Bullet (v. 1639-1716). Servant de cadre à des effigies de Louis XIV, deux nouvelles « places royales » sont dessinées par J. H.-Mansart*, qui, dans l’un et l’autre cas, surmonte d’un ordre colossal un soubassement à arcades pleines : la place des Victoires, circulaire, commencée en 1685 pour recevoir une statue en pied due à Martin Desjardins (de son vrai nom Martin Van den Bogaert, 1640-1694) ; mieux conservée, la place Louis-le-Grand, ou Vendôme, grand carré à pans coupés, au centre duquel la statue équestre de François Girardon (1628-1715) est inaugurée en 1699. À l’œuvre des architectes et des sculpteurs, il faut ajouter la production des manufactures royales des Gobelins* et de la Savonnerie : tapis, tapisseries, meubles, etc.

Au cours de cette période, la construction privée marque une pause, et les églises commencées alors (Saint-Louis-en-l’Île, par Le Vau, en 1664 ; Saint-Thomas-d’Aquin, par Bullet, en 1682) sont moins nombreuses que celles dont les travaux se poursuivent ou qui reçoivent des embellissements (Pierre Mignard*, ainsi, peint sa fameuse « gloire » à la coupole du Val-de-Grâce). C’est cependant à l’art sacré que Louis XIV consacrera, dans Paris, les deux grandes entreprises de la fin de son règne. J. H.-Mansart complète l’hôtel des Invalides par la construction (1680-1706) d’une seconde église, à coupole centrale (le dôme), où s’exprime tout le génie du classicisme français. La Fosse* et Jouvenet* sont les auteurs principaux de sa décoration peinte, terminée sous le règne de Louis XV. De 1708 à 1725, en accomplissement d’un vœu de Louis XIII, le roi fait transformer le chœur de Notre-Dame sous la direction de Robert de Cotte* ; de cet ensemble, il reste surtout des boiseries magnifiquement sculptées.


L’âge de la Rocaille*

Après l’embellissement intérieur apporté au Palais-Royal par le Régent, avec le concours du peintre Antoine Coypel*, cette période voit l’arrêt des entreprises de la monarchie. Elle n’est pas beaucoup plus fertile en créations de l’art religieux. Le chantier principal reste celui de Saint-Sulpice : Gilles-Marie Oppenordt* élève le transept et la nef, Juste Aurèle Meissonnier (1695-1750) donne pour la façade un projet de goût rococo, auquel sera préféré, en 1733, celui de G. N. Servandoni (1695-1766), d’esprit classique.

C’est sur l’habitation privée, reflet d’un nouveau genre de vie, que se porte principalement l’activité des architectes et de leurs auxiliaires. L’hôtel parisien tend à se réduire au corps de logis, qui reste placé de préférence entre cour et jardin ; les ailes s’abaissent des deux côtés de la cour, formant souvent un fer à cheval avec le mur où s’ouvre le portail. L’architecture extérieure garde généralement une réserve classique ; c’est à l’intérieur que les innovations se multiplient, remplaçant la solennité du siècle précédent par la commodité, le confort, l’élégance. Les appartements reçoivent des lambris sculptés, peints et dorés avec la fantaisie aimable de la rocaille. La peinture déserte les plafonds au profit des dessus de portes. Témoin d’un nouvel art de vivre, ce décor serait incomplet sans ce que lui apportent, grâce à leur habileté et leur goût, les maîtres des ateliers parisiens : menuisiers, ébénistes, ciseleurs, orfèvres...

Déjà un peu délaissé, le Marais accueille cependant l’ensemble (auj. occupé par les Archives nationales) que constituent les hôtels de Soubise et de Rohan, élevés à partir de 1705 par Pierre Alexis Delamair (1676-1745) dans un style majestueux et ornés extérieurement par le sculpteur Robert Le Lorrain (1666-1743), qui, vers 1735, se surpasse avec le bas-relief des Chevaux d’Apollon. Pour le prince et la princesse de Soubise, Boffrand* aménage de 1732 à 1740 de nouveaux appartements, chef-d’œuvre du décor rocaille auquel concourent les meilleurs sculpteurs et peintres du temps.