Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Paris (suite)

À Saint-Germain-des-Prés, le chœur de l’abbatiale, reconstruit à partir de 1163, a des voûtes sexpartites et trois étages d’ouvertures ; sous le clocher-porche, un portail à statues-colonnes rappelait ceux de Saint-Denis et de Chartres. Entrepris vers 1190 comme ouvrage de l’enceinte de Philippe Auguste, le château du Louvre était de plan carré, avec des tours d’angles et un énorme donjon cylindrique au milieu de la cour.


L’art gothique à l’âge de l’élégance

À partir du milieu du xiiie s., et au cours du siècle suivant, Paris devient le foyer d’un art gothique qui évolue vers l’allégement, une certaine préciosité, parfois un luxe favorisé par l’initiative royale. Le modèle est la Sainte-Chapelle, élevée au cœur du palais capétien par Saint Louis, de 1241 à 1248, sans doute sur les plans de Pierre de Montreuil. Il s’agit de deux chapelles superposées. Le vaisseau unique de la chapelle haute ressemble à une châsse avec son armature légère enserrant des vitraux dont les médaillons aux couleurs saturées illustrent les deux Testaments. Si l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés a perdu la chapelle de la Vierge dont l’avait embellie Pierre de Montreuil, celle de Saint-Martin-des-Champs (auj. Conservatoire national des arts et métiers) montre encore son beau réfectoire à deux nefs, attribué à ce maître.

Notre-Dame fut remaniée dans la seconde moitié du xiiie s. par Jean de Chelles, puis Pierre de Montreuil ; dans la première moitié du xive s., par Pierre de Chelles, Jean Ravy et Jean Le Bouteiller. L’adjonction de chapelles entre les contreforts imposa l’allongement du transept, qu’ajoure à chaque extrémité une immense rose. Le portail nord, où subsiste une statue de la Vierge à l’Enfant, le portail sud, consacré à l’histoire de saint Étienne qu’accompagnent des scènes de la vie universitaire, la petite « porte Rouge », les bas-reliefs ornant le chevet, enfin les hauts-reliefs de la clôture du chœur, aux sujets tirés du Nouveau Testament, illustrent l’évolution de la sculpture gothique vers une élégance de plus en plus précieuse.

Saint-Séverin et Saint-Germain-l’Auxerrois datent partiellement du milieu du xiiie s. Il faudrait aussi tenir compte des couvents démolis : Cordeliers, Grands-Augustins, Carmes Maubert, etc. La croissance de l’université exigea la construction de nombreux collèges ; il n’en reste guère que la chapelle du collège de Beauvais (xive s.). Les bâtiments royaux témoignent de la même évolution. Le palais de la Cité (auj. Palais de justice) fut amplifié sous le règne de Philippe le Bel. La Conciergerie a gardé ses tours, ses cuisines, ses deux superbes salles basses à nefs voûtées. Du Louvre de Philippe Auguste, Charles V fit une résidence ornée avec un luxe dont témoignait aussi son hôtel Saint-Paul, au Marais ; mais il laissa le caractère d’une forteresse à la Bastille, élevée comme ouvrage de l’enceinte dont il entreprit en 1367 d’entourer les quartiers de la rive droite. La tour dite « de Jean sans Peur » et l’entrée fortifiée de l’hôtel de Clisson (Archives nationales) sont les témoins de la construction privée de cette époque.

Le raffinement du style parisien est non moins sensible dans les rares témoignages d’une école de peinture liée au gothique international ; dans l’enluminure des manuscrits (Jean Pucelle*) ; dans l’orfèvrerie (Vierge de Jeanne d’Évreux, musée du Louvre) ; enfin, dans la sculpture des ivoires, en ronde bosse ou en bas relief (Couronnement de la Vierge, Louvre).

Après l’éclipsé provoquée par la guerre de Cent Ans, l’activité reprit, au milieu du xve s., sous la forme du gothique flamboyant, qui devait rester en honneur très avant dans le xvie s., souvent plus sobre qu’ailleurs. Une élévation intérieure réduite à deux étages signale les églises construites au cours de cette période, en partie ou en totalité : Saint-Germain-l’Auxerrois, Saint-Merri, Saint-Gervais, Saint-Nicolas-des-Champs, Saint-Séverin, plus richement orné, comme Saint-Jacques-de-la-Boucherie, dont il ne reste que le clocher, dit « tour Saint-Jacques ». Il faut y ajouter des édifices entièrement disparus : Saint-Jean-en-Grève, le Saint-Sépulcre, Saint-Victor. L’architecture civile de ce temps est représentée par deux anciennes résidences de dignitaires ecclésiastiques : l’hôtel des archevêques de Sens (1474-1519) et l’hôtel des abbés de Cluny (1485-1498), où la décoration flamboyante prête son luxe à une nouvelle conception de la demeure urbaine.


La Renaissance

En décidant, dès 1527, de se fixer en Île-de-France et à Paris, François Ier y introduisait le nouveau style. La Renaissance parisienne a rarement sacrifié au style fleuri qui avait prévalu dans le Val de Loire, en dehors de l’Hôtel de Ville, commencé en 1533 (et détruit en 1871) ; elle a d’emblée connu la maturité, avec un italianisme mieux compris, une inspiration plus savante. François Ier fit d’abord bâtir et décorer par Girolamo Della Robbia*, en bordure du bois de Boulogne, un château de chasse (auj. disparu) nommé Madrid en souvenir de sa captivité. En 1546, le roi chargeait Pierre Lescot* de transformer le Louvre* en résidence moderne. La façade sur cour de l’aile ouest, construite en premier, allie à l’équilibre des ordres superposés un faste que lui apporte sa décoration sculptée, œuvre de Jean Goujon* et de son atelier, comme les caryatides de la grande salle basse et les caissons du grand escalier à l’italienne ; sous les successeurs de François Ier, l’aile sud fut élevée sur les plans de Lescot. À l’ouest du Louvre, à partir de 1564, Catherine de Médicis fit bâtir par Philibert Delorme*, puis Jean Bullant le palais des Tuileries, de style plus sobre, mais plus grandiose. Souhaitant relier le Louvre aux Tuileries, la reine mère fit commencer la Petite Galerie, perpendiculaire à l’aile sud du Louvre, et planter les fondations de la Grande Galerie du Bord-de-l’Eau. Puis elle chargea Bullant de lui élever une nouvelle résidence, qui devait s’appeler plus tard hôtel de Soissons et dont subsiste (contre la Bourse de commerce, qui en occupe l’emplacement) une curieuse colonne astrologique. Quant à l’architecture privée, elle reste représentée par l’exemple presque unique de l’hôtel Carnavalet, construit vers 1545. Sa précieuse décoration sculptée est due à l’atelier de Goujon. Celui-ci a laissé son ouvrage le plus célèbre avec les bas-reliefs de la fontaine des Innocents, élevée à la même époque sur les dessins de Lescot.