Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

papier (suite)

La technique de fabrication n’a pas pour autant beaucoup changée. Les chiffons sont toujours triés, coupés, blutés, puis lessivés et égouttés. Après quoi, ils sont repris dans des piles défileuses qui remplacent les anciens maillets. Ces piles sont formées d’un cylindre d’environ 1 m de diamètre, muni de lames frottant dans le fond d’une cuve ovale (d’abord en bois, puis en ciment) contre une platine en métal qui coupe et sépare les fibres. Après blanchiment, la pâte est engraissée dans des piles raffineuses analogues aux précédentes, mais portant plus de lames et agissant avec une pression supérieure. Elles écrasent les fibres et les hydrolysent. L’opération dure plusieurs heures, suivant le degré de parcheminage désiré : à la limite, on pourrait obtenir une sorte de gel d’où les fibres auraient complètement disparu. À la sortie de la machine, le papier est collé ou non à la gélatine suivant qu’il est destiné à l’impression ou à l’écriture. L’invention de Robert fit baisser de façon sensible le prix de revient du papier, dont la production s’accrut d’autant plus vite qu’à la même époque furent inventées des machines à imprimer qui remplacèrent les anciennes presses à bras. Elle permit aussi d’utiliser des matières premières plus ordinaires, chiffons de couleur, déchets d’anciens papiers, et par là de diversifier les qualités et les usages du produit. C’est alors qu’apparurent les papiers d’emballage, puis vers le milieu du xixe s. le papier journal, qui eut rapidement des débouchés considérables.

En 1873, aux États-Unis, il y avait 800 papeteries comprenant 3 000 machines qui faisaient 200 000 t de papier. En 1867, en France, 130 000 t de papier pour tous les usages étaient fabriquées dans 280 fabriques, comprenant 140 cuves pour papier à la main, 270 machines à papier d’impression ou d’écriture et 130 machines pour le papier d’emballage. La profession employait alors 34 000 ouvriers, dont 11 000 femmes, principalement occupées au triage des chiffons et du papier. Devant l’augmentation de la consommation, on fut bientôt à court de chiffons. En 1844, Friedrich G. Keller découvrit la pâte mécanique, obtenue à partir de bois râpé, qui fut ensuite employée dans la fabrication du papier journal. Puis, après toutes sortes d’essais sur différentes plantes, orties, genêts, etc., l’Allemand Eilhard Mitscherlich (1794-1863) et l’Américain Benjamin C. Tilghman (1821-1901) réussirent à fabriquer les premières pâtes de bois chimiques, qui permirent l’essor industriel pris, depuis, par le papier.

La progression de la production fut alors extrêmement rapide. En France, elle passa de 20 000 t en 1800 à 50 000 t en 1850, 400 000 t en 1900, 700 000 t en 1930, 1 057 000 t en 1950, 2 230 000 t en 1960 pour atteindre 4 181 000 t en 1973. Cette augmentation importante de la production et des besoins est due non seulement au développement de l’impression et de l’emballage, mais surtout à une grande diversification des fabrications et des usages.


Différentes sortes de papiers


Papiers à usage graphique ou analogue

Ils sont destinés à l’impression ou à l’écriture.

• Papier journal. Le premier par la quantité, il sert à l’impression des quotidiens et est fabriqué en grande série de plus en plus par les pays gros producteurs de bois (Scandinavie, États-Unis, Canada).

• Papiers d’impression. Ils servent en typographie, en offset, en héliographie, etc.

• Papiers à écrire. Ils groupent tous les papiers d’écriture depuis celui des cahiers d’écoliers jusqu’au papier à lettre de luxe.

• Papiers pour dossiers et registres. Ces supports d’informations sont de plus en plus remplacés par des cartes mécanographiques ou statistiques.

• Bristols et papiers-calques.

• Papiers destinés à la reproduction. Ceux-ci comprennent le papier photo, dont le support doit être d’une grande pureté avant d’être enduit de baryte et sensibilisé, et les papiers de reprographie courants qui vont du Diazo jusqu’aux papiers des machines de bureau. On rattache à ce groupe les papiers les plus fins tels que les éditions de grand luxe, souvent encore « pur chiffon », les papiers pour titres et les papiers monnaie. La plupart de ces papiers fins sont fabriqués sur des machines un peu différentes de la machine de base, appelées formes rondes. La toile, portant généralement un filigrane, est enroulée sur un cylindre qui plonge dans la cuve de pâte. La feuille est fixée sur la toile par aspiration. La suite de la fabrication est la même.

• Papiers couchés. Jusqu’à la fin du xixe s., les revues et livres étaient illustrés de gravures sur bois dont l’impression ne demandait pas de qualité particulière. À cette époque furent inventées d’abord la photographie, puis la reproduction photographique par galvanoplastie de clichés tramés à trame assez fine, qui nécessitait une surface de papier très unie. La première idée fut de satiner des papiers très chargés en kaolin ou en talc. Puis, vers 1890, apparurent les papiers couchés, du nom déjà donné à certains papiers de fantaisie de couleur qu’on enduisait d’une couche formée de carbonate de calcium et de colorants collés à la gélatine étendue à la brosse sur la surface du papier. Les couchés pour impression ont remplacés le carbonate de calcium par du kaolin additionné de gélatine, puis de caséine, étendu à la brosse sur le papier. Celui-ci était ensuite séché dans de grandes salles chaudes où il était déployé sur des baguettes qui se promenaient sur un chemin de roulement à travers la salle. Après séchage, le papier était passé dans des calandres, c’est-à-dire des machines comportant des rouleaux de papier ou de coton compressé et des rouleaux de métal, qui lui donnaient un satinage important. La fabrication du papier couché se faisait alors à une vitesse de l’ordre de 30 m/mn.