Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pancréas (suite)

La chirurgie du pancréas

Elle a bénéficié des progrès des moyens d’investigation paracliniques : les radiographies du cadre duodénal, la duodénographie hypotonique, l’opacification des voies biliaires, les opacifications vasculaires (splénoportographie et artériographie sélective du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure) donnent des images « indirectes » des lésions pancréatiques. Par contre, la stratigraphie axiale transverse, la scintigraphie à la séléno-méthionine marquée, l’injection des canaux pancréatiques par cathétérisme de la papille sous fibroscopie fournissent des images directes de la glande et de ses canaux excréteurs. Ces différents examens apportent de précieux renseignements sur l’anatomie du pancréas, la nature et l’étendue de l’affection, ses rapports vasculaires. On peut ainsi choisir le type d’intervention qui s’impose : soit une opération d’exérèse, soit une opération de dérivation ou de drainage, ou encore une intervention indirecte.

Les opérations d’exérèse

Elles s’appliquent aussi bien aux lésions bénignes localisées (adénomes, kystes) qu’aux lésions malignes (cancers ou lésions de pancréatite aiguë et chronique). Ce sont :
— l’exérèse limitée (ablation d’un ou plusieurs adénomes) ;
— la pancréatectomie gauche (P. Mallet-Guy) ou « d’amont » (exérèse de la queue du pancréas, de la rate, d’une partie du corps du pancréas, plus ou moins étendue vers le droite) ;
— l’ablation du duodénum et de la tête du pancréas (R. B. Cattel, K. W. Warren, G. Guillemin), opération très délicate sur le plan technique (différents montages permettent de rétablir la continuité digestive et biliaire) ;
— la pancréatectomie « presque » totale (C. G. Child et M. Mercadier), conservant une mince languette de parenchyme au contact du duodénum ;
— la pancréatectomie totale (A. O. Whipple), d’indication exceptionnelle.

Très différentes de ces interventions « réglées » sont les exérèses « à la demande » de fragments de pancréas nécrosés, lors d’une pancréatite aiguë.

Interventions de drainage et de dérivations

Il peut s’agir du drainage d’une collection séro-hématique ou purulente après pancréatite aiguë, de la dérivation d’une cavité kystique par anastomose entre la formation pseudo-kystique et l’estomac, le duodénum ou une anse grêle, de la dérivation d’un canal de Wirsung dilaté, en rétention lors d’une pancréatite chronique ou encore d’une sphinctérotomie (H. Doubilet), section du sphincter favorisant un drainage interne.

Les interventions « indirectes »

On peut pratiquer une splanchnicectomie gauche (P. Mallet-Guy) ou bilatérale : elle consiste à couper un ou deux nerfs splanchniques. C’est une intervention à visée pathogénique dans le traitement des pancréatites chroniques ; des dérivations biliaires imposées par un ictère d’origine pancréatique (cancer de la tête comprimant le bas cholédoque) : la vésicule ou la voie biliaire principale est anastomosée au duodénum, à l’estomac ou à une anse grêle ; des dérivations digestives : gastro-entérostomie pour lutter contre une sténose duodénale par cancer ou pancréatite chronique, isolée ou associée à une dérivation biliaire. On peut pratiquer enfin une gastrectomie totale, lors du syndrome de Zollinger-Ellison (ulcères gastriques et adénome du pancréas).

Ces différentes interventions peuvent être utilisées seules ou associées selon la maladie initiale et son étendue.

Ph. de L.


Le cancer du pancréas

C’est une affection relativement rare. L’épithélioma du pancréas prédomine chez l’homme : il peut atteindre la tête (de 70 à 80 p. 100), le corps ou la queue de l’organe. C’est une tumeur le plus souvent de petit volume, très dure, bosselant et déformant le pancréas. Elle envahit progressivement le pancréas, comprimant puis obstruant le canal de Wirsung. Enfin, elle adhère aux organes voisins, puis les envahit : voies biliaires, estomac, côlon, veine porte (thrombose), veine cave ; les métastases sont régionales (ganglions péripancréatiques) et hépatiques surtout.

Cliniquement, un seul symptôme appartient en propre au cancer du pancréas : c’est la dénutrition intense et rapide. Tous les autres signes dépendent de la localisation du cancer.

• Le cancer de la tête, à début insidieux, est caractérisé par un ictère généralisé (jaunisse), remarquable par sa continuité et sa progressivité sur plusieurs semaines, sans douleur, sans fièvre ; c’est un ictère par rétention, typique, s’associant à des troubles digestifs (anorexie, nausées, diarrhée souvent), à un amaigrissement rapide et massif. La palpation de l’abdomen révèle un gros foie, indolore, une vésicule biliaire distendue. Selon la loi de Courvoisier et Terrier, qui peut cependant être prise en défaut, « la vésicule biliaire est rétractée dans la lithiase cholédocienne, elle est dilatée dans le cancer du pancréas ». L’hépatomégalie (gros foie) progressivement croissante aux examens successifs, l’ictère qui fonce de jour en jour sont caractéristiques de l’affection. Parmi les nombreuses formes cliniques, il faut isoler l’« ampullome vatérien », qui, par sa situation aux débouchés bilio-pancréatiques, peut se révéler à un stade de début par un ictère rétentionnel variable, évoluant par poussées et rémissions et pouvant donner des hémorragies digestives.

• Le cancer du corps du pancréas est caractérisé par les douleurs qui réalisent le syndrome pancréatico-solaire : douleurs épigastriques intenses, évoluant par courtes crises, associées à des troubles digestifs variés (nausées, vomissements, ballonnements).

• Le cancer de la queue est particulièrement insidieux ; surtout marqué par une altération isolée de l’état général, son diagnostic en est souvent fort difficile.

Le diagnostic de ces différentes formes se fait par la radiographie : l’opacification des organes voisins (estomac, duodénum, côlon, voies biliaires) permet de retrouver des signes indirects (refoulement, compression) ou directs (envahissement).

Des examens plus spécialisés sont souvent nécessaires. Les examens biologiques sont décevants. Le pronostic de ces cancers est grave ; ils sont souvent au-dessus de toute ressource d’exérèse chirurgicale.