Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Palmyre (suite)

D’Arabie venaient l’encens, les pierres précieuses ; de Tyr, les laines pourpres, la verrerie ; de Damas, les vins ; de l’Inde, le coton, l’indigo, les aromates variés ; de la Chine, la soie. La présence de marchands palmyréniens est attestée en divers points de l’Empire romain (concurremment avec celle de soldats) aussi bien que dans le golfe Persique et jusqu’à Merv (Mary). Les inscriptions de l’agora et des temples renseignent sur les grands marchands qui dirigeaient les opérations commerciales aux ier et iie s. apr. J.-C., époque de la plus grande prospérité des affaires. Celles-ci déclinèrent au iiie s., du fait de l’avènement des Sassanides, qui défavorisèrent le commerce caravanier, et des difficultés de l’Empire romain. Après l’apogée du iie s. et du début du iiie s., qui connaît les faveurs des empereurs (visite d’Hadrien en 129, qui déclare Palmyre cité libre ; titre de colonie romaine accordé par Caracalla en 211) et les constructions les plus somptueuses (grande colonnade), l’histoire de Palmyre s’insère dans les troubles politiques du iiie s.


Les aventures de Zénobie

Dans cette ville marchande, d’esprit oligarchique, une famille d’origine arabe avait acquis une position prépondérante. L’un de ses membres a porté le titre d’exarque des Palmyréniens. Un autre, Odenath, prit celui de roi des rois, tandis que Rome le récompensait de ses services guerriers face aux Sassanides par ceux de gouverneur de Syrie-Phénicie et de correcteur de l’Orient. Son assassinat, en 267, laissa le pouvoir à son fils Vaballath et à sa femme Zénobie, qui, en prenant les titres d’Augustus et d’Augusta, s’exposaient à la destinée périlleuse des usurpateurs de l’Empire. La cour de Zénobie était très brillante — fréquentée par des philosophes, tel Longin — et somptueuse : on y portait des costumes revêtus de pierreries, tout orientaux, parmi un décor par ailleurs très romanisé. Cette belle époque ne dura guère. L’empereur Aurélien* reprit la Syrie au général palmyrénien Zabda (bataille d’Émèse), assiégea Palmyre et captura la reine au cours de sa fuite (272). Elle mourut à Tibur après avoir orné le triomphe impérial. Palmyre, révoltée en 273, fut saccagée et ne joua plus qu’un rôle de place forte. Dans les temps qui suivirent, certains temples furent convertis en église ou en synagogue. Occupée par Khālid ibn al-Walīd en 634, la ville n’a plus eu grande importance à l’époque islamique.


Les ruines

Les vestiges, dominés par de nombreuses colonnes et situées en plein désert, ont un aspect grandiose. Les fouilles n’ont été entreprises qu’au xxe s. (allemandes en 1902 et 1917, françaises en 1928-1930), mais sont très activement menées depuis vingt ans (fouilles suisses, françaises, polonaises et syriennes), exhumant des centaines de bas-reliefs et d’inscriptions nouvelles. Les monuments sont immenses, surtout les temples, qui sont entourés, à la manière orientale, d’une vaste enceinte sacrée, close. À l’est se trouve le temple de Bêl, le grand dieu de la cité, successeur de Bôl, formant une triade avec ses parèdres Aglibôl et Yarhibôl. La cella à niches et à terrasse accessible et les aménagements des alentours évoquent un culte aux rites particuliers, processions avec chapelles portatives, sacrifices et repas sacrés. Les dieux sont souvent représentés porteurs de l’uniforme militaire romain. La grande avenue à colonnes qui traverse la ville, bordée de boutiques, dotée de canalisations d’eau, mène de là au temple dédié à Nabô, scribe des dieux, « bon et rémunérateur », d’origine babylonienne, au théâtre, aux thermes dits « de Dioclétien », à l’agora, reconstruite vers l’époque d’Hadrien. Vers le nord se trouve le vaste temple de Baalshamin (ier - iie s.), consacré au « maître des cieux », phénicien. C’est probablement la forme évoluée de ce dieu qu’on rencontre mentionnée au iie s., fréquemment, en qualité de divinité suprême dont on tait le nom, miséricordieuse, voire unique. La grande colonnade aboutit au site appelé Camp de Dioclétien, de la fin du iiie s., et qui peut être soit un camp militaire, soit un palais, prolongement ou reconstruction de celui de Zénobie. À l’ouest, en direction de Homs, la vallée des Tombeaux est remplie de monuments de types variés : principalement des tours funéraires (tour de Jamblique, ier s. apr. J.-C.) et des hypogées (iie s. apr. J.-C.). Leur exploration a fourni ces nombreux reliefs à portraits, d’un art oriental qui rappelle celui des Parthes (alors que l’architecture, elle, est très hellénistique et romaine), caractérisés par le hiératisme, la frontalité des personnages, la pétrification des attitudes.

R. H.

 D. T. Schlumberger, la Palmyrène du Nord-Ouest (Geuthner, 1952). / J. Starcky, Palmyre (A. Maisonneuve, 1952). / K. Michalowski, Palmyre, fouilles polonaises (Mouton, La Haye, 1961). / R. du Mesnil du Buisson, les Tessères et les monnaies de Palmyre (De Boccard, 1962). / P. Collart et J. Vicari, le Sanctuaire de Baalshamin à Palmyre (Droz, Genève, et Minard, 1969 ; 2 vol.).

paludisme ou malaria

Protozoose sanguine due à un parasite hématozoaire, du genre Plasmodium, transmis par un Moustique vecteur, l’Anophèle femelle.


Cette endémie parasitaire majeure est responsable actuellement encore de plus d’un million de décès par an et l’on estime à plus d’un milliard le nombre de sujets impaludés dans le monde.


Historique

Connu de longue date, le paludisme était appelé au xviie s. fièvre des marécages. En 1630, les vertus de l’essence de quinquina sont découvertes et l’on distingue alors parmi les fièvres celles qui sont sensibles de celles qui sont résistantes à cette médication. En 1820, deux pharmaciens français, P. J. Pelletier et J. B. Caventou, isolent l’alcaloïde actif du quinquina, la quinine. En 1880, Alphonse Laveran (1845-1922), médecin militaire français, isole l’agent pathogène au sein des hématies. Les espèces pathogènes pour l’Homme seront individualisées successivement : Plasmodium vivax, Plasmodium falciparum, Plasmodium malariæ, et, plus tard, Plasmodium ovale. Le rôle des Moustiques du genre Anophèle, soupçonné par sir Ronald Ross (1857-1932) vers 1895, est confirmé par Giovanni Battista Grassi (1854-1925) en 1898. L’existence d’un cycle exoérythrocytaire (hors des hématies) dans le foie expliquant la survenue d’accès de reviviscence caractéristiques de la maladie ne sera mise en évidence qu’en 1948 par Shortt et Garnhan. Enfin, à partir de 1940, la thérapeutique antipalustre entre dans une nouvelle phase avec la découverte de nouvelles substances dites « anlimalariques de synthèse », qui seront largement utilisées au cours de la guerre du Pacifique. Mais, depuis 1965, l’apparition de souches de Plasmodium falciparum résistant aux antimalariques de synthèse les plus utilisés est venue assombrir les espoirs d’éradication du paludisme, notamment lors de la guerre du Viêt-nam. Aussi, dans le domaine épidémiologique, les efforts de l’Organisation mondiale de la santé s’orientent-ils dorénavant vers la recherche de nouveaux antimalariques de synthèse à longue durée d’action dans la cadre d’une lutte antipalustre menée pas à pas.