Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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palamisme (suite)

Pour autant, il ne s’ensuit pas que soient créées, comme disent les barlaamites, les touches divines que le mystique expérimente par grâce en son cœur purifié par l’ascèse, notamment la vision d’une lumière identique à celle dont jouirent au Thabor les disciples privilégiés. Car, selon Palamas, la tradition patristique et surtout les Cappadociens et le pseudo-Denys suggèrent de distinguer réellement en Dieu l’essence inconnaissable et inaccessible et les « énergies » (attributs dynamiques) communicables. C’est par celles-ci, tout aussi incréées, que le spirituel communie à la vie divine et bénéficie dès ici-bas de la vision de Dieu. Cette distinction introduite dans l’être divin par Palamas sous la pression dialectique de ses contradicteurs se présente comme la justification métaphysique du palamisme. Elle provoqua d’abord dans l’orthodoxie elle-même, puis dans le cadre de la polémique gréco-latine une ardente controverse non encore parfaitement apaisée et dont voici les grandes lignes.

Par décisions synodales (juin et août 1341), les antipalamites Barlaam et Grégoire Akindynos avaient été condamnés, et l’on avait imposé silence aux deux partis. Dans le contexte de la guerre civile consécutive à la mort de l’empereur Andronic III Paléologue (août 1341), Akindynos ranima la dispute, appuyé par le patriarche de Constantinople Jean XIV Calécas (1334-1347), qui fit arrêter Palamas (printemps 1343) et alla même jusqu’à l’excommunier comme hérésiarque (4 nov. 1344). Bientôt un revirement politique aboutit à la déposition du patriarche (début 1347) et à la réhabilitation du docteur hésychaste, sacré archevêque de Thessalonique (mai 1347). Dans l’intervalle, celui-ci avait eu soin de répondre par de nombreux écrits aux attaques de ses adversaires. Sous la présidence du basileus Jean VI Cantacuzène*, l’important concile de juillet 1351 condamna l’antipalamite Nicéphore Grégoras (1296-1360) et publia le Tome synodal, qui constitue l’approbation officielle du palamisme, enregistrée par le Synodikon de l’orthodoxie et confirmée par la canonisation, en 1368, de Grégoire Palamas.

Par la même occasion, un autre adversaire de Palamas, Prochore Cydonès, fut dégradé et excommunié. Avec son frère Démétrios (v. 1324 - v. 1400) qui vengea sa mémoire, il figure au Synodikon comme hérétique. À noter que ces antipalamites, comme aussi Jean Cyparissiotès et quelques autres, adhérèrent à l’Église romaine, ce qu’avait déjà fait, grâce à Pétrarque, Barlaam le Calabrais, mort évêque de Gérace. Par là s’est accréditée parmi les catholiques la certitude d’un antagonisme radical entre palamisme et thomisme, à tel point que leurs théologiens ont longtemps considéré — et certains d’entre eux sont encore de cet avis — la doctrine de Palamas comme la négation manifestement hérétique des dogmes de foi touchant l’absolue simplicité divine, la grâce habituelle et la vision béatifique.

Pendant plusieurs siècles, le palamisme est resté dans l’ombre au sein de l’orthodoxie, et les œuvres de son auteur sont demeurées en grande partie inédites. Même un admirateur de Palamas comme Nicolas Cabasilas (v. 1320 - v. 1387) ne l’intègre pas à sa remarquable théologie sacramentaire. Toutefois, la réalité spirituelle (divinisation) que Palamas entendait sauvegarder à tout prix a survécu à l’effondrement de l’Empire byzantin grâce aux promoteurs du renouveau hésychaste athonite (Nicodème l’Hagiorite, etc.) et au profond courant mystique russe.

Depuis quelques décades, on assiste à un « revival » de la théologie palamite. Le mérite en revient principalement à l’orthodoxie russe d’implantation occidentale, représentée par Vladimir Lossky († 1958), Mgr Basile Krivocheine et surtout Jean Meyendorff, dont la synthèse, désormais classique, a été repercutée par un orthodoxe français, Olivier Clément. Tous sont les artisans de ce qu’on a appelé le néo-palamisme. L’orthodoxie hellénique a suivi le mouvement, et c’est elle, comme de juste, qui patronne l’édition en cours des œuvres de Palamas.

De nos jours, les théologiens catholiques sensibles à l’œcuménisme ont renoncé à assimiler le palamisme à une hérésie et acceptent volontiers de voir dans le docteur hésychaste le champion de la théologie monastique, de la théologie vécue face aux tentatives humanistes visant à réduire le mystère divin aux dimensions rationnelles de la théodicée. Il paraît possible, en effet, de trouver dans la doctrine de saint Maxime le Confesseur (v. 580-662) et dans la Confession du troisième concile œcuménique (680-81) « le lieu dogmatique de l’interprétation correcte du palamisme, le seul qui devrait pouvoir permettre sa parfaite réception œcuménique dans la tradition de l’Église indivise » (J. M. Garrigues).

P. G.

➙ Orthodoxes.

 J. Meyendorff, Grégoire Palamas. « Défense des saints hésychastes » (thèse, Paris, 1959) ; Saint-Grégoire Palamas et la mystique orthodoxe (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1959). / J. Meyendorff et H. I. Marrou (sous la dir. de), Introduction à l’étude de Grégoire Palamas (Éd. du Seuil, 1959). / Œuvres complètes de Grégoire Palamas, éd. par P. Chrestou (en grec, Thessalonique, 1962-1972 ; 3 vol.).

Palatinat

En allem. Pfalz, région historique de l’Allemagne.



Des origines au xvie siècle

Le terme de Palatinat recouvre deux réalités nettement différentes avant 1803 et après 1815. À partir du xie s. émerge autour de Worms une entité politique, le comté palatin du Rhin. En 1156 l’empereur Frédéric Ier* Barberousse attribue ce comté à son frère Conrad, déjà en possession de la Franconie rhénane, de sorte que, désormais, les domaines palatins s’étendent sur les deux rives du Rhin, du Neckar inférieur à la Moselle inférieure. En 1214, ces territoires passent au duc de Bavière Louis Ier de Wittelsbach, dont la famille fait de Heidelberg la capitale de ce comté jusqu’en 1803. L’accord de Pavie (1329) crée deux branches séparées jusqu’en 1777. La branche cadette obtient le comté palatin rhénan ainsi que le Haut-Palatinat en Franconie. Par la Bulle d’or de 1356, Charles IV* confère à cette branche seule la dignité électorale.