Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
R

Rothschild (famille) (suite)

Le fondateur de la dynastie, Meyer Amschel (1743-1812), fripier et ferrailleur à Francfort-sur-le-Main, obtint la confiance du prince Guillaume de Hesse-Cassel et devint son banquier.

Durant les guerres napoléoniennes, il fit fortune en plaçant habilement les avoirs du prince en exil, en recrutant des mercenaires pour le compte des États en guerre contre Napoléon, et en faisant entrer clandestinement des marchandises provenant d'Angleterre durant le Blocus continental. Il établit également ses cinq fils dans les grandes villes euro-péennes : Londres, Vienne, Naples et Paris. Les Rothschild prêtèrent aux souverains et aux États, participèrent au financement des compagnies de chemin de fer et achetèrent des titres publics et privés, revendus ensuite dans le public avec de fructueux bénéfices.

Avec le développement des grandes banques d'affaires et de dépôt (à partir du milieu du xixe siècle), les Rothschild perdirent leur place privilégiée au sein de la haute banque, tout en restant à la tête d'établissements financiers encore prestigieux à la fin du xxe siècle

P. B.

Rueff (Jacques)

Économiste français (1896-1978), défenseur de la convertibilité des monnaies en or.

Après sa participation à la réforme monétaire de Poincaré en 1926, il a été directeur du Trésor (1936-1939) et vice-gouverneur de la Banque de France (1939-1940). Après la guerre, il a dirigé l'Agence pour les réparations de guerre avant d'être nommé à la Cour européenne de justice en 1958. Fervent libéral, il est connu pour son analyse de la situation britannique dans l'entre-deux-guerres, qu'il explique par les rigidités à la baisse des salaires et l'existence d'un salaire minimum, perturbant le fonctionnement du marché du travail.

Il a critiqué le régime d'étalon de change-or utilisé dans le système monétaire international hérité de Bretton Woods, dont le fonctionnement serait biaisé au profit du dollar qui devient équivalent de l'or (« Dollar as good as Gold »). Son projet alternatif de retour à l'étalon-or, ramenant le dollar au même statut que les autres monnaies, a reçu l'appui du général de Gaulle

P. L.

➙ Chômage, emploi, franc, France, Grande-Bretagne, libéralisme économique, revenu minimum, SMIC

Russie

La Fédération de Russie est le principal État successeur de l'URSS, désintégrée en 1991. Elle s'est engagée dans un processus de transition vers l'économie de marché et la démocratie, qui est moins avancé et plus chaotique que dans les pays de l'Est (PECO). Les effets pervers de la transition donnent à la Russie les traits d'une économie – ni socialiste ni capitaliste – ne respectant pas les règles du marché.

La Russie a hérité de l'ex-URSS : son appareil d'État, son armée, sa monnaie, sa banque centrale, ses dettes, 150 (de ses 287) millions d'habitants. Elle a regroupé onze anciennes républiques de l'URSS au sein de la Communauté des États indépendants (CEI) : Arménie, Azerbaïdjan, Belarus, Géorgie, Kazakhstan, Kirghizistan, Mol- dova, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan, Ukraine. La transition n'y a commencé qu'en 1992, inégalement.

Le programme de stabilisation russe adopté en 1992 est beaucoup moins complet et cohérent que dans les PECO. Centré sur la libération des prix, son impact inflationniste a appauvri une grande partie de la population. Il est abandonné au bout d'un an pour une politique économique plus fluctuante dans un contexte de moins en moins démocratique (assaut du Parlement par les forces armées, guerre en Tchétchénie). Un nouveau programme de 1995, basé sur la stabilisation du rouble dans une bande de fluctuation prédéterminée par rapport au dollar, finit par maîtriser l'inflation en 1997, mais il n'interrompt pas une chute de la production, qui dure depuis dix ans.

Un déficit budgétaire persistant, entretenu par des recettes fiscales défaillantes (évasion et fraude fiscales), a conduit l'État russe à pratiquer la séquestration budgétaire (gel des dépenses et arriérés de paiement), à se financer par l'émission de bons du Trésor (GKO) à taux d'intérêt très élevés, attirant d'importants capitaux spéculatifs. Le financement monétaire du déficit, la baisse du prix du pétrole et des réserves de change, et la crise asiatique, mettent fin à la confiance des investisseurs, notamment étrangers, qui quittent le marché des GKO. En août 1998, l'État russe, incapable d'honorer ses engagements, dévalue puis laisse flotter le rouble, impose un moratoire sur les prêts qu'il a contractés et, pour éviter la faillite de tout le système bancaire (qui a spéculé sur les GKO et le rouble), déclare la faillite de plusieurs banques et en renfloue quelques autres. Des enquêtes sont ouvertes depuis lors sur les délits d'initiés de divers responsables russes impliqués dans cette spéculation.

En 1993-1994, la Russie a appliqué un programme de privatisation de masse : des coupons d'une valeur faciale (légale) de 10 000 roubles ont été distribués gratuitement à toute la population. Perdant très vite de leur valeur du fait de l'inflation et étant cessibles, nombre de ces coupons sont alors vendus par leurs titulaires à des managers d'entreprises privatisables. Il en résulte une concentration de l'actionnariat aux mains des anciens managers, qui empêche toute restructuration. Après juin 1994, on entre dans la phase de privatisation monétaire : elle ne peut plus se réaliser que par la vente des actifs ou des actions, ce qui en ralentit le rythme. Cette phase marque une redistribution partielle des actions détenues par les managers vers des actionnaires extérieurs aux entreprises (outsiders) : « nouveaux riches », businessmen (souvent anciens dirigeants du parti, de l'État, des services secrets), oligarques et banques. Celles-ci acquièrent des actions de firmes endettées auprès d'elles, dans un échange « titres contre dettes » très avantageux en 1995. Ainsi se forment les groupes industriels-financiers russes, dont certains résultent aussi de la transformation d'anciennes directions des ministères sectoriels en sociétés par actions. Leur présence réduit la concurrence, remplacée alors par des réseaux de relations personnelles au sein de l'élite.