Dictionnaire de l'économie 2000Éd. 2000
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Kaldor (Nicholas)

Économiste britannique, né en Hongrie (1908-1986), l'un des principaux animateurs du courant post-keynésien.

Avec d'autres, comme Joan Robinson, il refusa la récupération de Keynes par l'approche néoclassique. Dans ses travaux, il s'est efforcé de transposer les conclusions keynésiennes sur l'importance de la demande à l'analyse de la croissance et de la répartition. À ce titre, il participa aux controverses qui, dans les décennies 1950 et 1960, opposèrent son courant à l'approche néoclassique dans le domaine des théories de la croissance (Essays on Economic Stability and Growth, 1960).

P. U.

Kalecki (Michal)

Économiste polonais (1899-1970), qui élabora dès 1933 une théorie de la demande effective, proche de celle que formulera Keynes en 1936.

Sa démonstration repose cependant sur des bases différentes (inspiration marxiste, rôle de la concurrence imparfaite, etc.). Auteur de Theory of Economic Dynamics (1954), il participa au courant post-keynésien. Kaldor résumait sa théorie de la répartition par la phrase suivante : « Les capitalistes gagnent ce qu'ils dépensent, les travailleurs dépensent ce qu'ils gagnent. »

P. U.

Keynes (John Maynard)

Économiste anglais (1883-1946) dont l'influence a été majeure au xxe siècle par sa critique du laissez-faire et sa justification de l'intervention de l'État dans la lutte contre le chômage.

Militant pacifiste, collectionneur d'art, ami de Virginia Woolf, de Bernard Shaw et de Ludwig Wittgenstein, il s'est engagé par son activité et ses écrits dans les débats autant théoriques que politiques de son temps, critiquant dans les Conséquences économiques de la paix (1919) le montant excessif des réparations de guerre qui étaient exigées de l'Allemagne. Ses thèses ont accompagné le développement de l'économie mixte après 1945 et influencé l'orientation de la politique économique, au moins jusqu'à la crise des années 1970.

Une théorie centrée sur les évolutions de la demande

Élève d'Alfred Marshall, il étudie tout d'abord les questions monétaires, développant l'analyse de son maître. Dans deux ouvrages im- portants (A Tract on Mo- netary Reform en 1923 et A Treatise on Money en 1930), il s'oppose toutefois au retour de son pays à l'étalon-or, et à la théorie quantitative de la monnaie. C'est en 1936 qu'il rompt définitivement ses liens avec l'orthodoxie en publiant la Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, texte fondateur d'une révolution en macroéconomie.

Dans ce livre, il veut justifier la prise en charge par l'État de la lutte contre le chômage, et la place centrale de l'arme budgétaire dans le dispositif de la politique économique. Au cœur de son analyse, on trouve le principe de la demande effective : la production prenant du temps, les entrepreneurs doivent fixer leur volume d'activité avant que la demande s'exprime. Celle-ci doit donc être anticipée. Mais, raisonnant dans le cadre d'une économie monétaire, où la vente de la production est essentielle, Keynes considère qu'elle n'est pas assurée du fait de la possibilité pour les agents de conserver leur épargne sous forme liquide (la thésaurisation) ; les agents épargnent en fonction de leurs anticipations sur la conjoncture financière (s'ils pensent que les taux d'intérêt vont augmenter, il peut être justifié pour eux de moins consommer et d'attendre cette hausse des taux pour effectuer des placements financiers). Cette thésaurisation constituant une fuite hors du circuit de la dépense, l'offre ne crée plus nécessairement sa propre demande puis- qu'une partie des revenus distribués est mise en attente. C'est cette possibilité d'une insuffisance de la demande qui, selon Keynes, expliquerait le chômage.

La demande peut néanmoins être soutenue par les dépenses d'investissement des firmes, qui se développent tant que le taux d'efficacité marginale du capital (le taux de profit anticipé) est plus élevé que le taux d'intérêt, exprimant le coût du financement. L'État peut certes s'efforcer de réduire le taux d'intérêt (par une politique monétaire appropriée), mais Keynes juge que ce moyen risque d'être trop peu efficace compte tenu des réactions spéculatives du public. Il en découle que seule la politique budgétaire de l'État, par le biais d'un accroissement des dépenses publiques à l'effet multiplicateur, peut sortir l'économie du piège du chômage.

Dans le même temps et jusqu'à sa mort, Keynes a conseillé la puissance publique : dès 1929, il soutint les politiques de grands travaux et, en 1944, il représenta la Grande-Bretagne à la conférence de Bretton Woods, où il ne parvint pas à imposer son plan de réforme du système monétaire international (SMI) face aux Américains.

P. L.

➙ Budget de l'État, circuit, débouchés, déséquilibre, école néoclassique, (M.) Friedman, (F. A. von) Hayek, (J. R.) Hicks, keynésianisme, libéralisme économique, New Deal, (A. C.) Pigou, post-keynésiens, relance, (J.) Rueff, (P. A.) Samuelson, synthèse néoclassique

Keynésianisme

Courant d'idées inspiré par J. M. Keynes, dont le point commun est le rejet du libéralisme économique et l'appel à l'intervention de l'État, dans le cadre d'une économie mixte.

Plusieurs lignées d'économistes se sont réclamées de Keynes après 1936, pour des emprunts de nature différente. D'un côté, les néo-keynésiens, ou keynésiens de la synthèse néoclassique, ont surtout retenu du maître de Cambridge que l'intervention publique permettait le retour au plein-emploi, tout en laissant au marché son rôle de coordination des activités individuelles. D'un autre côté, les post-keynésiens se veulent fidèles au projet théorique de Keynes d'élaborer un corpus analytique alternatif.

Sur le plan de la politique économique, le keynésianisme tient à :

• une conception de l'État, garant de l'intérêt général, auquel il incombe de réguler l'économie,

• un objectif prioritaire, la lutte contre le chômage, et, plus généralement, la stabilisation du niveau d'activité de plein-emploi,

• un instrument principal, la politique budgétaire qui permet un réglage fin de la conjoncture en jouant sur la pression fiscale et le montant des dépenses publiques,